Alain Crozier

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LC73 journal  > archives > Avant LC73 partie I (1989 à 1993)


Introduction

Les introductions sont toujours un exercice périlleux et qui peut paraître à certains comme l’allégorie de l’arrogance de l’auteur quand elles sont faites par l’auteur lui-même. Tiens par exemple cette introduction ressemble à celle d’un livre de Allan Stewart Konisberg. Les avertissements ne valent pas mieux... Beaucoup de gens ne lisent pas les introductions ou les avertissements. Des auteurs utilisent souvent des noms propres ou communs tels, qu’il faille aller chercher leur signification dans un dictionnaire ou pour les plus pervers, consulter un érudit*.
Pour un journal l’introduction n’est pas une obligation en soit. Et puis de toute façon il n’y a pas de quoi en faire un roman. Quoique…
Bon finalement je l’ai fait mon introduction…

* Un érudit n'est pas un ouvrage mais une personne qui s'en rapproche un peu.

 

…Avertissement

La suite ne sera pas toujours aussi drôle qu’un livre de Konisberg. Elle sera toujours la reproduction fidèle de la réalité. C’est un journal de bord d’une aventure artistique pluridisciplinaire. Sans nulle autres prétentions.



PARTIE I

La naissance des fantômes



Avant 1989
ou...
La solitude



Il se produit durant l'enfance, des événements qui marquent à jamais la personnalité de chacun. Certains éléments restés dans notre inconscient, ressurgissent beaucoup d'années plus tard, expliquant alors certaines choses.
Mes grands-parents hébergeaient un peintre, Chavignac. Je devais avoir 5 ou 6 ans, quand j'allais le voir dans son atelier qui donnait sur le lac. Ce vieux monsieur ressemblait à Albert Einstein, il avait une blouse blanche bariolée de peintures.
J'ai écouté les Beatles dès mes premières années, la radio étant toujours branchée sur France Inter à la maison. Mais mes vacances, passées chez des cousins cousines, baignaient dans la chanson françaises. Brassens, Renaud, Big Bazar. Je me souviens du soir de la mort de John Lennon. J'avais 7 ans, mais j'avais été touché par la gravité de l'événement.
Une voisine d'enfance qui part à New York, et cette ville devient mythique et proche. A 6 ou 7 ans. Une influence, tout comme le monde de la mer avec Alain Colas, Tanio, Amoco Cadix.

L'enfance, mon enfance, semble maintenant avoir quelque chose du paradis. Pas de soucis, pas d'ennuis, pas de contrainte. Juste aller à l'école. La vie est alors portée sur le plaisir de vivre. Le plus beau jour de l'année dans l'enfance, est le matin de Noël. On sent cette atmosphère de paix. Il y aura des cadeaux agréables qui seront pour la plupart des surprises. Sommet de l'enfance, mais partagé seul. Fils unique. Les avantages ? Aucun pour moi. La seule chose positive quand on est enfant unique est que l'on se forge une certaine personnalité. Forte et fragile. L'indépendance, par obligation. Pourtant, je ne supporte plus cette solitude, sauf celle nécessaire à mes travaux intellectuels. Ou alors rester seul parce qu'il est temps de partir de faire un tour dehors avant que ça ne dérape.
Enfant unique, indépendant. Par mon caractère, je suis hyperémotif, sensible. Timidité et manque de confiance n'ont été vaincu que récemment, en même temps que le trac. Manque d'affection... Mais l'inconsciente solitude de l'enfance a tout emporté sur le fonds. Je me complaisais comme ça. Ecole, football, maison, rien d'autre. Quelques amis, mais tous disparus, avant le lycée. Les meilleurs partant en premier. Les meilleurs.

Carine, Claire, mes deux copines d'enfance, mes deux voisines, qui partageaient tous mes après écoles. Mes parents avaient deux maisons, je naviguais entre les deux selon les jours et les saisons. Carine, la fille du boulanger, Claire la fille d'un monsieur qui travaillait dans une grande entreprise de LC. Carine, c'était des heures de plaisirs à jouer dans son grenier, immense, le paradis des enfants. Claire possédait aussi un environnement apaisant. J'avais pour elle des sentiments, des sensations indescriptibles. Je me sentais bien avec elle. Par chance elles ne sont pas parties en même temps, mais elles sont quand même parties, que je n'étais pas encore arrivé au collège. J'ai longtemps ignoré que ma séparation des ces deux amies d'enfances m'avait finalement séparer totalement de sexe féminin, même à 10 ans, et presque même de toute amitié. Avec elles, c'était la confiance, la confiance à l'âge de 6 ans. Alors, je subis un choc sans le savoir, en les voyant partir, même si elles ne sont pas parties comme ça, presque sans prévenir. Elles sont parties lentement. A 10 ans ! Il y avait bien Yannick, un copain aussi de Claire, mais ce n'était pas pareil.
Voilà pourquoi je me suis toujours plus entendu avec les filles, puis avec les femmes, voilà donc pourquoi je dois avoir des côtés féminins. Les 20 années qui ont suivi, furent de l'observation et aussi, à partir du début des années 90, de la création.

Triste de dire que j'ai du attendre le lycée pour m'en remettre, pour retrouver l'envie d'avoir des amies filles. Le collège ne fut qu'un long calvaire les deux premières années, les deux dernières étant plus faciles à avaler, retrouvant Yannick et une bonne bande de zouaves. Mais les filles… Je me rappelle la première dont je suis tombé amoureux, une certaine Mylène, lors d'un voyage scolaire. Ce sentiment d'être amoureux était très agréable, j'étais simplement heureux. Comme je me complaisais dans ma solitude, je me complaisais d'être seulement heureux d'être amoureux, je n'avais pas le manque d'aller plus loin, même s'il y avait des couples déjà au collège. Des couples forcement de pacotilles, comme dans le show business… J'ai aimé après une autre fille, mais inaccessible par sa beauté, et très timide. Mais j'étais très bien sans copine, comme la majorité des garçons. Je peux dire que je n'ai eu ni copines, ni amies au collège.

Mes étés étaient solitaires. Activités solitaires. Des fois ma mère venait avec moi à la piscine. Sinon, je faisais du vélo, je marchais. La télévision. Seul. Je m'amusais. Je stagnais dans mon développent intellectuel. Mon père me fit découvrir le football, et je lui en suis reconnaissant. Les années collèges furent la gestation de la créativité.

Ma première année de lycée fut le résumé de 4 années de collège mais quand gardant les points négatifs. Seul, seul, timide, rejeté, moqué. Ou manque de confiance. J'avais quand même des amis, dont un que je vois toujours. C'est bien la seule chose positive de cette année là. J'avais l'impression d'avoir des professeurs tyranniques dans chaque matière, ce qui était vrai au moins pour les sciences physiques. Trop complexé, même pas amoureux d'une seule fille, ou alors, je ne m'en rappelle pas. Cette année scolaire était l'enfer scolaire. Je ne fut guère épargné l'année suivante, mais après, au fils des ans, je me suis remis à parler aux filles, entre amies, amours platoniques, flirt, physique, passion, destruction… j'avais en même temps intégré une bande au village.

Mon journal raconte la suite de mes aventures et désenchantements. Même si j'ai oublié certaines dates, de rencontres comme Pierrette ou Steffy, des événements… Le doute et la méfiance sont des ennemis devenus progressifs, je n'arrive pas à les évacuer.
Quand on a que la solitude, on s'habitue. Quand on est avec des gens bien on y prend goût.


1989

Fin août. J'ai changé de lycée pendant cet été, pensant sans doute que mes mauvais résultats étaient à mettre au compte du climat peu clément de Wittmer. Je m'apprête donc à découvrir une nouvelle ville, un nouveau lycée et l'internat de la Cité Scolaire.

Début septembre. Je termine la pré-saison de football par un tournoi qui se passe très mal pour mon club et rentre en retard chez moi où j'ai rendez-vous au restaurant avec ma famille. Il faisait pourtant beau, un après-midi de fin de grandes vacances.

Rentrée de septembre. Comme l'an dernier, je connais très peu de monde dans ma classe et dans les autres. Je me suis inscrit à la section rugby du lycée. Je rentre chez moi les week-ends. Je n'ai pas de chance : mes nouveaux professeurs sont soit fous, soit laxistes, soit psychopathes…. Je crois que je regrette déjà Wittmer. Je me fais bien des nouveaux copains mais c'est la misère morale qui m'envahis doucement. Que fais-je dans cette galère ? Les mercredis après-midi sont rapidement consacrés à la biture en toute impunité, tant que les horaires des matches et entraînements de rugby nous le permettent.

Octobre. Je vais à Paris pour les vacances de Toussaint. Je prends des photos trop artistiques ! Le ciel est gris, comme Paris.

Novembre. Je profite de samedi pour changer d'air, j'erre à Roanne, rejoignant des compagnons de spleen du lycée.
Certaines matières enseignées me déplaisent fortement. Pourquoi suis-je dans cette filière qui n'a rien de spirituelle, de littéraire, de cérébrale? Je me sens en terrain miné. L'année sera longue. Bien que dans d'autres matières, je fasse des rencontres majeures.

Décembre. J'ai un devoir de français sur la mélancolie ! Hors concours. Mes résultats sont bons sans plus, voir passables. Peut mieux faire. Je suis "absent" des cours, participant rarement. Je me terre, déjà, dans mes mystères. Les vacances de Noël arrivent à point car je sature.


1990

Janvier (12). Je reçois une lettre de mon correspondant d'Allemagne, où il me dit ce qu'il devient.

Janvier (18). Jour à marquer d'une pierre blanche. Pour mon anniversaire, avec une semaine de retard je reçois un cadeau du ciel : le coup de foudre dans un couloir du lycée. Comme ça ! Elle s'appelle Marie-Anne. C'est la première fois que je ressens quelque chose pour quelqu'un de cette brutale façon. Il se crée un choc tellurique dans ma tête. Le compte-rendu du second trimestre scolaire est loin : bon élève, du travail fourni, l'inverse selon les disciplines. Trop discret, réservé…
Les événements dans le monde sont marqués par le mouvement pour la libération de Nelson Mandela, la guerre d'Irlande, le mur de Berlin. Des groupes comme U2, Pink Floyd et Simple Minds entretiennent les relations entre l'actualité et la musique new wave et aussi avec des camarades de la Cité Scolaire et de Wittmer, comme Oliver.

Janvier (25). Jour à marquer d'une pierre noir. Marie-Anne est indisponible pour une durée presque définitive. Mais finalement elle n'a pas l'air très spirituel. Je lui parle, elle est physique, sympathique mais quelque chose cloche.

Février. Vacances. Je traîne à Roanne avec les mêmes personnes. Je vais voir des matches de basket. Je me trahis en pensant encore à Marie-Anne. Mais mon cœur balance entre elle et Elle, dont je suis aussi éperdument fou. Ces deux termes "éperdument" et "fou" traduisent bien ma perte du sens des réalités. Elles sont nées le même jour à deux ans d'intervalle. Coïncidence ou signe du destin, signe qu'elles resteront quoiqu'il se passe ou ne se passe, dans mon esprit ? Elle, Elle, est en cours de biologie avec moi. Mon agenda devient de plus en plus le repère de mes pensées, plus que des choses que j'ai à faire. Je commence à écrire mes premiers textes, sur elles.

Mars. Mes affaires en amours se compliquent. Je ne réalise pas des fois que je suis censé être ici pour étudier.

Mars (14). Je serais bientôt fixé sur mon sort, concernant cette fille, Elle, qui me rend lentement fou. Elle n'est pas à tomber par terre. C'est peut-être son visage poupon. Je ne devrais pas me fier à ce que dit un "ami". Je suis trop faible pour ignorer ce qu'il m'a dit. On me fixe un rendez-vous. Cette rencontre se couple d'une rencontre décisive pour le titre académique de rugby. Coup double espéré.

Mars (17). Depuis hier j'ai l'impression d'être sur un nuage. Ni drogue, ni alcool. C'est Elle, sa vision, j'en prends tous les jours. J'envisage toutes les hypothèses. Rêvée, bonne, amère, terrible.

Mars (19). J'ai rendez-vous jeudi. J'atteindrai d'ici là le paroxysme de la folie. Je me concerte énormément avec un ami pour me relaxer.

Mars (20). Jour de sélection pour le match. Jour du printemps. Jour à marquer d'un pierre noire : je ne suis pas dans le groupe pour la finale. Je n'avais pas prévu cela dans mes différentes hypothèses. Mauvais signe. Je n'ai pas vu Elle aujourd'hui, et je n'ai pu lui faire part de ma déception.

Mars (21). A 7h30 je dois parler à une amie de Elle, pour savoir si elle sait. Mes coéquipiers perdent sans vraiment jouer, ce qui rehausse ma non-sélection.

Mars (22). Journée à marquer d'un pierre noire, bien noire, plus que noire, la plus noire des pierres. 13h02, Elle me transperce… de poison. Pourquoi me regardait-elle si souvent avec intensité ? Je n'en saurais pas plus et je ne veux pas en savoir plus. La fin d'un autre rêve ? Pas sûr. Pourtant une idée horrible me traverse l'esprit. Il y a une fracture morale sur cette année scolaire. Je suis en train de couler. J'ai le cœur touché, à la dérive.

Mars (26). J'aime encore Marie-Anne, par dépit, par défaut. J'essaye de comprendre ce qui se passe, je n'ai même pas pu parler à Elle. Vais-je sombrer dans la débauche ?

Mars (27). Je devais aller à Roanne mais, j'ai pris la décision de ne pas y aller. L'an prochain, je serais peut-être dans la classe de Marie-Anne ou de Elle, seul avec l'une d'elles. Un "ami" qui devait lui parler et revenu deux fois sans l'avoir fait. Je crois qu'il se fout de moi qu’il a peur de lui parler. Je suis saturé, vivement les vacances.

Avril (09-14). Nouveau voyage à Paris pour ces vacances de Pâques. C'est le printemps opposé à l'automne de la Toussaint. Il y a pourtant plein de points communs entre ces deux voyages. Même si pour ce second séjour, j'ai un peu la tête ailleurs et du vague à l'âme.
Je ne sais pas si Elle croit que je me fous d'elle ou si c'est Elle qui se fout de moi. Je ne devrais pas insister si j'étais plus mâture. Je ne devrais surtout plus lui écrire. Je dois l’oublier.

Avril (17). C'est la rentrée des vacances. Elle ne veut plus me regarder, mais elle a un anorak rouge. Et après la lettre que je lui ai écrite … Je crois que c'est parti. Je suis touché par la grâce de l'inspiration. J'écris à profusion des textes sur Elle. Elle, arrogante et regard hautain. Des textes qui servirait à un groupe de rock, dont je serais le chanteur, l'icône noire.

Avril (18). L'après-midi du mercredi est essentiellement consacré à la glande, la saison s'étant terminée en même temps que notre élimination, "leur" élimination devrais-je dire. Nous achetons des bières que nous buvons en face de la Cité. Ou nous allons écouter de la musique dans un petit squat aménagé dans un des greniers du lycée. Il n'y a que des vieux disques, mais j'aime ça : Pink Floyd, Zappa, etc. Nous avons le droit à deux soirées télé par semaine à la place de la salle d'étude. J'avais choisi ce soir car il y avait un match très important de football, Marseille jouait une place un finale à Benfica. Et on s'est bien fait baiser la gueule, de la main. Je ne garderais que de mauvais souvenir de cette salle de télé, entre les défaites en Coupes d'Europe et les navets.

Avril (24). Seule absence de l'année, pour cause de grève. J'ai aussi récemment décidé de rentrer chez moi un mercredi après-midi ce qui déclencha les foudres de la surveillante en chef.
Résultat du dernier trimestre : je passe entre le mur et l'affiche : bon élève, baisse de régime, se contente de trop peu, terne, mais dans ces conditions c'est déjà pas mal, on note aussi en sport "a pris confiance en sois" sûrement par compensation au vu de ma non-sélection pour la finale de rugby.

Avril (30). Rendez-vous à Roanne avec Alex. Sans suite.

Mai (04). Pour me consoler, je me dis candidement que, si Elle me haïssait vraiment, elle ne me regarderait moins souvent. Hypothèse d'école.

Mai (12). 9h30, je vais voir le courrier. Elle … m'a … écrit. Comme je ne veux pas gâcher la finale de la Coupe d'Angleterre de football à la télévision, je ne lis tout de suite cet envoi. 18h45, je vais lire la lettre. Je m'attends à tout pour ne pas être déçu et je me dis qu'il y a Alex qui m'attend peut-être. 18h47, je lèche le timbre qu'elle a léché, où elle a déposé ses anticorps. 18h53, j'écoute Seed of love. 18h59, je décide de reporter la lecture à 19h25. 19h30, cette lettre, ce n'était pas la mort !

Mai (19). Je reçois une lettre de Thierry. Ca faisait un an que je n'avais plus eu de contact avec lui. Je lui avais écrit et il m'a répondu : il tourne son premier film autour du 8 juillet, autour de la campagne. Grosse bringue en vue. Je me rappelle notre rencontre sous le préau de Wittmer pendant les J.O. de Séoul.

Mai (29). C'est donc leur anniversaire. Je n'ai envoyé une carte qu'à Elle.

Mai (31). Elle me "déteste" marqué par sa copine sur mon agenda. Complété par "tu le sais ?". Je m'en doutais mais je ne voulais pas l'admettre.

Juin (01). La Coupe du Monde de football va commencer.

Juin (28). La fin fût houleuse mais en roue libre. Je quitte cette Cité. Je n'ai côtoyé que l'hypocrisie et la bêtise. Je rejoindrai l'élite scolaire sous d'autres cieux à la rentrée. A part Laurent A, je ne retiens aucune amitié.

Juillet (8). Tournage depuis hier d'un film d'anthologie du cinéma indépendant. Peu de dialogue, il n'y avait pas de dialoguiste. Ca me permet d'évacuer certaines pensées. Quoique, dans ce film policier je me fasse tuer à la fin, comme tout le monde. Le tueur était le réalisateur. Requiem pour un tueur. Avec Thierry d’autres de Wittmer, Fab, JC, Sam, Alain B et Paul-Albert.

Septembre (7). Je remplis les pages de mon agenda scolaire de pensées … profondes … et de briques de mur, en souvenir de celui de Berlin sans doute. Je comptabilise mes textes. J'en ai écrit une dizaine et j'ai des tonnes d'idées, de moutures.

Septembre (13). L'année vient de débuter et j'ai déjà beaucoup de devoirs à faire en espagnol. J'ai un nouvel ami, Geronimo de la tribu des surfeurs, qui lui, est digne de confiance. Je pense encore aller à Paris pour la Toussaint. Je suis dans la section d'élite mais dans une classe pour le bas de la crème. On est une petite vingtaine. Pas mal de filles, ça me change de l'an dernier où il n'y en avait que quatre. Je retrouve aussi dans d'autres classes des élèves venant de LC : Oliver, José...

Septembre (29). Il y a beaucoup de Carine (ou Karine) et de Stéphanie au lycée. C'est l'été indien mais l'automne et son cortège de pastels s'annonce à la fenêtre. La douleur d'Elle ? Je la ressens bizarrement quand je vais à Roanne, comme récemment lors d'une journée de grève où mon lycée était fermé. Peut-être parce que j'y élaborais là-bas des stratégies de chasse alambiquées ?? J'ai suivi la manifestation des lycéens de Roanne, en prenant, je ne sais pas pourquoi de photos ! Futur R.G. ?

Octobre. J'écris une lettre à un ancien de la Cité Scolaire, pour qu'il m'aide à retrouver la trace de Claire, ma meilleure amie d'enfance. Il habitait le même immeuble qu'elle. Je lui dis aussi de se méfier d'une sainte-nitouche qui doit encore rôder à au lycée cette année.
C'est toujours en espagnol que l'on a le plus de travail à faire, en quantité. Je vais toujours à Roanne de temps en temps, le samedi ou le mercredi après-midi. Je ne sais pourquoi, je deviens un supporter de l'Olympique Lyonnais. La proximité géographique peut-être. J'entretiens ma réputation au billard. Je vais souvent au café du Palais, en face du lycée entre une et deux, avec mon pote Geronimo.
Je me laisse séduire par une fille de seconde, moi qui devrais être en classe de terminale, mais elle a des préjugés insoutenables.
J'ai décidé de ne pas aller à Paris.

Novembre (5). Bulletin du premier quadrimestre : l'espoir ne dura le temps que dure les roses. A la seconde note en mathématiques et en physique, je dois me rendre à l'évidence que faire partie de l'élite était un peu trop prétentieux. Beaucoup trop de lacunes, connaissances élémentaires non acquises, pas concerné, aucun travail.
Je trouve un nom pour mon groupe encore imaginaire : Clan 69. J'emprunte même le concept de l'affiche de concert à un groupe de corbeaux de LC. Je vais décidément un peu trop loin en ce moment. Par contre, je n'écris toujours pas de pensées dignes de ce nom.

Novembre (12). Je fais la liste de ma discothèque personnelle et je demande celle de plusieurs camarades de classe. Il y a une réunion pour un voyage à Prague, mais je n'y vais pas. Je réfléchis à mon inscription pour le permis de conduire. J'ai encore le temps puisque je ne serais majeur qu'en janvier prochain.
Je pense encore en peu à Elle.

Novembre (19). On a fait la traditionnelle photo de classe. Je ne la pendrais pas. Comme d'habitude !

Novembre (30). Je pense déjà à des noms de remix pour mes textes. Il faudrait que je trouve des musiciens ou que je me mette au clavier.

Décembre (7). J'ai des rendez-vous avec des musiciens pour faire un groupe et plus tard avec des filles. Je ne mélange pas le travail et le sexe. Je vais souvent au café avec copains et copines, la plupart sont en classe de seconde. C'est le temps du café crème. Il fait nuit vers 17 heures, nous ne voyons pas le jour car nous finissons rarement avant cette heure. Ca drague dur au café.

Décembre (14). Absence pour cause de neige. Le car n'est pas passé ce matin. 20 kilomètres dans la neige, c'est beaucoup pour aller au lycée, surtout pour ce que je vais y faire. L'hiver est rude en ce moment. Avec José et une fille de sa classe, Afi, qui est aussi de LC, on va alors se prendre un café au café justement. Je manque de me briser le poigné : je glisse comme dans les bandes dessinées, comme si j'avais marché sur une peau de banane. Je me retrouve à un moment à l'horizontal, avant de retomber, donc, sur mon poigné. Et là rien. Un jour de chance. L'ambiance est géniale, au lieu d'aller au lycée, nous nous retrouvons avec une journée à glander dans la neige. Au programme chez José : dégustation de Batida de coco, visionnage de The Wall, en version originale, sans les sous-titres. L'après-midi, balade dans la neige, bistrot. Il y a longtemps que je n'étais pas resté dans les rues du bled, un jour d'école. J'ai cette sensation étrange de liberté, alors que tout le monde travaille ou est à l'école.

Décembre (18). Suis-je vraiment sérieux ? Je vois une annonce pour louer un grand studio meublé, à deux pas du lycée et je me pose des questions. Est-ce raisonnable ?

Décembre (20). Un camarade de la Cité Scolaire m'envoie les dernières nouvelles du front : plus de punks qu'avant, de filles super.

Décembre (31). Rien d'exceptionnel encore cette année. Je suis allé avec des amis à Lyon pour du shopping. Je crois que j'ai horreur de cette ville. Ou de ses gens. J'y rencontre des personnes bien étranges. Ils vivent dans ce que j'appelle un taudis. Et ils sont heureux. Et ils font la morale.
Sur mon agenda, je fais du photo-roman : je découpe dans les magazines de télévision des photos de cinéma auxquelles je joins une bulle personnelle qui n'a rien à voir avec le film. Est-ce vraiment de l'art ou une forme qui s'en approche ?


1991

Janvier (5). Bulletin du second quadrimestre : "plus aucun travail", là où il y avait "aucun travail" (!), non-intégré (?), ensemble insuffisant semble bien résumé une situation peu reluisante. Il n'y a qu'en sport où je prends irrésistiblement mon essor, mon envol. Je deviens de façon assez inexplicable une bête d'endurance. Peut-être à cause de la précédente année scolaire et mes déboires sportifs et amoureux. La solitude du coureur de fond, sans doute…

Janvier (7). C'est l'anniversaire de la fille aux préjugés. Plus ça va et plus je laisse de place sur mon agenda pour les idées concernant mon futur groupe. Je n'ai pourtant toujours pas trouvé de musiciens.
Je suis sous l'attraction d'une autre. Belle mais surtout intelligente. Grosse et belle tête. Une copine en plus de la fille aux préjugés. Un signe ?

Janvier (12). Hier c'était mon anniversaire. Je suis majeur. J'ai organisé ce soir une petite réception dans mon salon avec des camarades de lycée. Vodka, champagne... C'était gentil, simple, bon.

Janvier (14). Je me suis pris une taule au café en face du lycée avec Geronimo. Comment ai-je pu rentrer chez moi et manger ? J'ai été malade. Je me suis couché à 19 heures pour me réveiller ce matin à l'heure habituelle pour prendre le bus. On en a mis. Nous étions deux au départ, je voulais juste lui payer un coup. Et puis Pierre, Paul et les autres sont venus au fur et à mesure. Blanc pêche, blanc cassis, blanc n'importe quoi. On a fait tous les sirops. On a fini au blanc liqueur de cassis. Ca m'a achevé sans doute.

Janvier (21). Je me perds un peu dans tous les anniversaires que j'ai à fêter. Encore l'anniversaire d'une Carine. J'en aime un peu trop à la fois pour que cela soit vraiment sérieux. Crédible.
Je change d'écriture. C'est une chose importante. J'écris en script, fini les belles lettres cerclées. Finis les lettres qui se tiennent les unes aux autres. Je m'émancipe de l'éducation donnée depuis le cours primaire.

Janvier (29). La guerre du golf a de particulier le fait que l'on puisse la suivre tous les matins à la télévision, avec les céréales. La France semble découvrir la désinformation.

Janvier (31). La personne de la Cité Scolaire qui m'avait fait parvenir une lettre le 20 décembre, m'envoient encore des nouvelles : Guerre du golf, folie, philosophie hédoniste. Je le vois bien partir au Népal.

Février (12). J'ai rendu mon tablier, avec Geronimo. Nous sommes officieusement en vacances. En grandes vacances. On nous a fait comprendre que même avec un miracle, nous ne passerions pas en terminale. Réorientation à voir. Donc nous ne faisons plus rien jusqu'en septembre. Certains profs sont désabusés. Donc nous laissent tranquilles, comme nous laissons tranquille le reste de la classe. On est assez intelligent pour ne pas perturber le cours. Cela me laisse le temps en cours de rêver. Je regarde par la fenêtre. C'est l'hiver. La neige recouvre les toitures du lycée. Ca me fait penser au Cercle des poètes disparus. J'ai commencé les leçons de code.

Février (18). L'amie d'un ami me présente Aude, une fille qui voulait me rencontrer. Coup classique. Elle est musicienne. C'est ce qu'elle prétend.

Février (20). Aude me donne un enregistrement de ce qu'elle fait. De la musique classique, au piano. Comme je ne connais rien au classique, elle peut me bluffer. Mais c'est quand même trop pro pour être vrai. En plus il y a sur certains passages, plusieurs instruments. Ca ressemble plutôt à un enregistrement fait à la radio.

Mars (8). Petite beuverie chez moi avec Oliver et un camarade de classe à lui. J'ai acheté mon premier numéro des Inrockuptibles sur les conseils du camarade d'Oliver. Il y a en effet une longue interview de mon icône du moment, Morrissey. C'est une révélation. Depuis l'an dernier, j'écoute beaucoup les Smiths. Oliver m'a fait connaître un grand nombre de groupes, et je suis avec lui l'actualité musicale.

Mars (19). Depuis quelque temps une fille, Sabrina, me reluquait aux intercours. J'avais rendez-vous avec elle à 10 heures. Pendant que je lui faisais la discussion, elle m'embrassa. Bien que cela me fit de l'effet, je me sentis très vite dans une situation que je ne désirais pas vraiment.
Ce soir il y avait un match important de football. Montpellier recevait Manchester United et avait fait match nul (1-1) en Angleterre. C'est la première fois depuis le retour des clubs anglais qu'il y avait un match d'eux à la télévision. Forcement puisqu'il n'y avait que deux clubs engagés dans les coupes d'Europe, Aston Villa se faisant voler par l'Inter de Milan, club mussolinien que j'ai toujours détesté. J'ai plus pensé à cette fille qu'au match. Comment en finir rapidement et courtoisement avec elle ? Manchester United se qualifie.

Mars (20). Je préférais ne pas laisser le temps au temps de nous attacher. A 10 heures je me déchargeais d'une liaison non-désirée. Elle a pleuré. Je me sens dégueulasse. Il y a un autre match ce soir, encore plus grand : Marseille - Milan. Je pourrai le regarder l'esprit libre. Pour en revenir Sabrina, elle m'a tendu une perche : un poème trop vite écrit pour m'impressionner. Hélas, j'avais étudié en cours ce poème de … Baudelaire.

Mars (27). J'ai arrêté le football en club pour me consacrer à mes études. On voit le résultat. J'ai pris une licence au lycée et je participe à un tournoi de basket. Je tente une expérience. Intéressant. Peut-être ai-je envie de me rapprocher de Cat, très gentille brunette, douce, jolie, rencontrée dans la rue, dans un état second. J'ai craqué le jour du tournoi interclasse du lycée.

Mars (29). Avec ma classe, un voyage de deux jours a été organisé, partant d'une boutade. Il y a des boutades qui mènent loin. Vite fait bien fait tout est prévu. On vote le spectacle que l'on va aller voir. Des fois je haïs la démocratie.

Avril (4). Absence pour cause de code.

Avril (9). Départ pour Paris très tôt. Dans le bus certains font des expériences bizarres. Pâté avec cake au chocolat. Moi j'ai en tête une expérience plus constructive. La première journée consiste en une visite du Parc Technologique de La Villette. Il faut bien une journée pour voir, presque, tout. A 17 heures nous sommes sur les Champs. Nous rejoindrons notre hôtel près de la Bastille un peu plus tard. Là-bas nous retrouvons un groupe de charmantes filles qui viennent aussi de province. Nous nous promenons dans la minuscule cours en caleçon. Une copine de LC essaye de m'inciter à lire Sade. Ca a l'air sympa comme lecture.

Avril (10). J'ai faillis me faire prendre ce matin avec de l'herbe de … Provence ! Mis à part cette frayeur qui n'avait pas lieu d'être, le musée est formidable, et je reconnais quelques tableaux. J'ouvre une parenthèse à propos des cours optionnels de dessins à Wittmer, qui sont le bordel organisé. On sent constamment une création ambiante. C'est le délire permanent. J'y vais comme ça, pour apprendre, pour capter des éléments techniques ou des inspirations pour plus tard. C'est le cours où je suis le plus attentif à tout ce passe. Et il s'en passe, ça part dans tous les sens. Parenthèse terminée.
Nous avons l'après-midi de libre et c'est la campagne qui débarque à Paris. Sans complexe, sans gueule de quinze mètres de long. Nous repartons à16 heures pour notre Bourgogne profonde. Nous suivons dans le bus le déroulement de la demi-finale de Marseille en Coupe d'Europe. Nous rentrons tard à la maison.

Avril (24). Je participe, à ma première compétition d'athlétisme, à Vichy. Ville sympa, propre et sportive. Sauf en 1940. Je loupe de peu la qualification de Marseille pour la finale de la C1.

Avril (25). Les beaux jours étant de plus en plus présents, avec Geronimo nous désertons le self-service pour nous prendre une baguette est un paquet de saucisse de Strasbourg, avec une bière pour faire passer le tout. Bière soleil. C'est sûr qu'après une telle pause de midi, nous laissons tranquillement le cours d'espagnol se dérouler. La prof nous appelle les Dalton, avec un troisième élément du fonds de classe.

Avril (26). C'est le bal de fin d'année du lycée, précédé de quelques heures par un bizutage. J'avais prévu tout ça (délit d'initié). Ce bal c'est l'aventure, perdu en pleine campagne. Bal des nazes. J'avais eu l'idée de faire venir un groupe de rock, mais les personnes chargées de l'organisation en ont profité finalement pour jouer eux-mêmes. Bal aussi des occasions manquées. Et puis il n'y avait pas Aude, la fille rencontré il y a quelques mois, une fille à problèmes : parisienne, parents séparés, pas motivée par les études. En quelque sorte ma copine, sauf qu'on a une relation bizarroïde, je n'arrive pas à la situer. Un jour elle veut, puis un jour elle ne veut pas.

Mai (15). Manchester United gagne la C2. Moi je rate l'épreuve de conduite du permis. Dans ma classe, tous s'affairent sur leur liste de textes de français pour le bac. Pas moi ni Geronimo. Aude a disparût.

Mai (29). Anniversaire de qui je sais. Je tente en vain de persuader Cat de venir avec moi cet été dans le Sud. Quelle déception ! Je croyais en mon étoile en ce 29 mai chargé de symbole dorénavant. Marseille aussi, pour sa finale.

Juin (11). J'ai un rendez-vous avec une ophtalmologiste. Je vais porter des lunettes. Depuis le temps qu'on me le conseille. Demain, c'est la fin de l'année scolaire. Je change de section l'an prochain.

Juin (19). Baccalauréat de français, sans pression. J'en ai plus lors des leçons de conduite.

Juillet. En épluchant les résultats du bac par curiosité je tombe sur un nom et un prénom que j'avais perdu de vue depuis au moins dix ans. J'écris à tout hasard à ce qui pourrait être son adresse. Claire, une de mes deux grandes copines d'enfance.
Je vais passer l'été comme employé dans une usine locale. J'ai les week-ends pour sortir et découvrir une bande de copain un peu spécial, les copains du frère à Oliver. Geronimo vient me voir un après-midi.

Juillet (14). Grande journée hier. Je reçois une lettre de Claire que je dévore dix mille fois. Je vais avec Oliver chez Thierry qui organise une fête. Il y a les habitués, Fab et JC. J'y retrouve les bonnes ambiances, j'ai donné à boire aux poissons, fumer beaucoup de cigares, manger de la paella, fait un mélange bizarre, Bailey's avec coca. Faire du stop un 14 juillet est à déconseiller aux personnes pressées.

Suite de l'été. Je fais des fêtes à dormir dehors en pleine campagne. Lors de la première, sur le chemin de l'aller, je suis à l'arrière d'une voiture de société avec Oliver. Vu qu'on n'a pas le permis, Oliver nous a trouvé un chauffeur, un ami à Lucien, son frère, Gros. On ne savait pas comment on rentrerait, ni à quelle heure. C'était d'autant plus excitant que nous roulions à vive allure sur de petites routes de campagne, la nuit tombant. La musique dans la voiture était terriblement excitante, les Charlatans. A la fête, tout le monde était raide comme des queues de pie. J'ai revu des anciens de la Cité, des rugbymen, des "miss pattes en l'air". Nous sommes rentrés en stop à 6 heures du matin, après s'être trompés à la sortie du bourg où la fête avait lieue. Il n'y avait pas d'éclairage public, nous avions pris la route dans le mauvais sens.
Philosophiquement, c'est année blanche qui vient de se terminer. Pas une seule pensée dans mon agenda. Je savais depuis janvier qu'il m'était impossible de passer l'échelon supérieur. Ce fut mes plus longues grandes vacances, coupées par mon premier emploi pendant la période habituelle de grandes vacances.

Septembre (1). Aujourd'hui il s'est enfin mit à pleuvoir.

Septembre (2). J'ai repris le football en club après une année sabbatique. On fait du cross dans les bois. Je vais de temps à autre chez une copine de mon ancienne classe.

Septembre (8). J'ai écris un nouveau texte de chanson sur cette copine d'enfance, Claire, dont j'ai repris le contact par lettre cet été après de longues années sans nouvelles. J'ai entendu sa voix aujourd'hui pour la première fois depuis 9 ans. Elle passera bientôt me voir à l'occasion.

Septembre (11). C'est la rentrée. Geronimo m'a suivit dans ma nouvelle orientation, on s'est suivi, on ne se quitte pas. J'écris à Claire.

Septembre (13). Je reprends mes habitudes au café du lycée.

Septembre (15). Reprise totale des activités puisque le championnat de football a repris ce matin, de bonne heure à 9 heures, contre une équipe au jeu viril.

Septembre (30). Le premier mois de cours s'achève. Ca se passe bien pour la première fois depuis le collège. Dans toutes les matières, à part l'espagnol vite relégué comme matière facultative et sans grande importance. Les profs sont tous sympas. Pas un pli sur mon agenda. Toujours pas de pensées philosophiques, toujours pas de noms de groupes, de choses qui ne sont pas liées à mes devoirs, où à des choses à penser pour les cours du lendemain.

Octobre (23). J'apporte mes chefs d'œuvre de pochettes d'albums en cours de dessins pour me les faire analyser. A quoi cela peut-il bien me servir puisque cela reste si subjectif !

Octobre (27). Belle journée. Les vacances ont commencé vendredi soir, bien arrosées au café du lycée. Aujourd'hui je marque deux buts contre le club de la ville de mon lycée et ce soir j'étais invité à une fête organisée par des banlieusards de LC, qui sont pour la plupart à Wittmer.

Novembre (4). Les vacances sont finies. Rien d'exceptionnel. Je suis allé à Roanne. Enfin je commence à noter des idées musicales sur mon agenda. J'ai passé une annonce dans le gratuit du coin, comme quoi je recherchais des musiciens ou un groupe. J'ai eu plein de coup de fil. Je n'ai sélectionné qu'un seul contact. Rendez-vous à Roanne mais comme je n'ai toujours pas le permis de conduire, cela me bloque pour aller à leur répétition qui se déroulent à 30 kilomètres de chez moi. Je traîne avec Oliver et José surtout, comme au lycée.

Novembre (10). Je découvre en image le basket américain.

Novembre (16). Je vais à ma première répétition. Mon père m'emmène. Ce n'est pas surréaliste ça ! Le groupe a pris le nom du lieu dit où se situe la grange où l'on joue. Perdue sur une colline après dix mille virages. On fait surtout des reprises : Noir Désir, Cure...

Novembre (29). Le voyage scolaire de cette année aura lieu en montagne grâce à notre professeur d'économie qui est de là-bas, dans les Alpes. C'est dans moins d'un mois. On y pense tous, plus qu'au bac de français. Sinon je ne rate pas un épisode de 21 Jump Street. Je les enregistre car ils débutent à 17 heures. Je les regarde en arrivant, avec un café. Quel dépaysement ! Quel dieu ce Johnny Depp ! "l'assassin s'est levé avant l'aurore, il a enfilé ses bottes et ensuite, ensuite il est descendu dans le hall.

- Papa !
- Oui fiston ?
- J'ai envie de tuer. Maman, je veux du travail !

Décembre (5). Ma mère m'a payé un dictionnaire de citations. J'en trouve plein sur la philosophie. Je me prépare déjà à l'an prochain. Mon prof de français est drôle : c'est un Alsacien qui a l'accent de Marseille.

Décembre (12). Bulletin du premier quadrimestre : que d'éloges, j'en suis rouge. Bons résultats, ensemble convenable, satisfaisant. Un an après le sport, c'est en français que se produit la révélation. Jusque là médiocre, ne comprenant pas le sens des textes, n'ayant aucun talent pour écrire, je passe du statut de mauvais à satisfaisant élève. A coup sûr l'effet de déconvenues sentimentales antérieures. Je crois que quelque chose c'est passé quand j'ai travaillé sur les grands poètes français, Baudelaire, Rimbaud, Verlaine : il faut avoir souffert pour écrire. Les artistes et écrivains semblent inutiles à beaucoup puisqu'ils ne produisent que du vent.

Décembre (14). C'est presque les vacances depuis hier. La semaine prochaine, les cours seront allégés avec du ski les après-midi. Je vais à Roanne pour acheter les dernières choses qui me manquent pour le séjour en montagne.

Décembre (15). Bizarre de retrouver toute sa classe un dimanche matin, à 8 heures. C'est un beau voyage, partant vers l'inconnu. Il fait beau. Plus on s'approche de l'arrivée, plus on s'excite. Et puis on découvre le paradis idéal. Paysage de carte postale en cette fin de dimanche après-midi, dernier rayons de soleil. Les pistes arrivent aux pieds de notre hôtel. Et puis surtout nous avons la station pour nous seul !

Décembre (16). Matin ski de fonds. Pas à l'aise sur des skis, même de fonds. Par contre, je passe un après-midi fantastique. Le décor est digne de Quand les aigles attaquent. Après avoir escaladé en télésiège une partie de la montagne, nous redescendons en luge. Il neige. La descente dure au moins deux ou trois heures. Il y a beaucoup de pauses, histoire de voir si tout le monde suit. On rigole, on blague avec les profs, notamment avec celui d'histoire qui était déjà à Paris l'an dernier. La journée se termine par une fête. On a bien sué du matin au soir.

Décembre (17). Intelligemment j'ai demandé à ma prof d'économie de m'abstenir de ski aujourd'hui : vu mes exploits hier, vu que je commence à ressentir une vieille douleur à un genou… Comme elle avait prévu d'aller en bas, en ville, faire des courses, elle m'invite à venir avec elle. Ca me fera toujours découvrir une nouvelle ville. Une camarade de classe se joint également à nous. Encore de la luge l'après-midi. Soirée vidéo. On aurait pu regarder Les bronzés font du ski.

Décembre (18). Rien le matin, luge l'après-midi et play-back le soir. Trivial poursuit jusqu'à très tard. Je gagne avec Geronimo contre l'équipe des profs. Tout un symbole. Mais contre ma culture générale et la chance innée de mon compagnon, que peuvent bien faire deux profs ? Ma prof d'économie de conseille sur le coup de faire Sciences Politiques après le bac.

Décembre (19). Grande journée de ski de piste tout juste coupée par le déjeuner. Bataille de boule de neige et luge en nocturne, improvisées. Encore une fête le soir. Celle de l'au revoir à la montagne.

Décembre (20). Retour à la maison. C'est les vacances. Cela fait bizarre car on a passé déjà une semaine de vacances, on a quand même entretenu nos études, surtout par des parties de Trivial poursuit. Les lumières de ma rue me semblent comme jamais merveilleuses rassurantes. Je retrouve ma bande au café. J'ai encore la tête à la station.

Décembre (23). Je suis à fonds dans le mouvement grunge et noisy : Nirvana, Pixies, Teenage Fan Club… Grâce au membres de mon groupe et à ma bande.

Décembre (31). Je passe le réveillon chez Thierry, retrouvant par la même les autres vielles branches. Nous buvons énormément, nous allons dans un restaurant chinois. Nous hésitons à rentrer dans une boite. J'observe deux jeunes filles qui me font des signes à travers l'œil de bœuf de leur maison bourgeoise.
Cette année 1991 m'aura permis de faire mes débuts dans l'écriture. J'ai en effet écris une nouvelle assez délirante. Ca part dans tous les sens. Je dois avouer que la personne qui m'a donné envie d'écrire ce genre de récits n'est autre que frère d'Oliver, Lucien. J'ai une des siennes, Pamphlet à la masturbation ou quelque chose comme ça.


1992

Janvier (1). Retour chez moi difficile. Nuit blanche, lunette noire. Je rentre en train pour midi. Il y a plein de pèlerins dans le train. Des Italiens et Italiennes. Ca parle fort. Je regrette d'avoir mangé chinois et bu écossais.

Janvier (8). Jour à marquer d'une pierre blanche. Ou rose. J'ai enfin le permis. Avec une inspectrice. Avec l'inspecteur je crois que je ne l'aurai jamais décroché. Ca se fête pardi !

Janvier (18). Je reprends les répétitions. J'y emmène Oliver. C'est la grosse défonce pour fêter mon permis, mais je reste sérieux. Mon bassiste me file plein de pirates de Cure, et je fais mes premières compilations : noisy and baggy sound.

Janvier (24). Une camarade de classe, Cécile, nous paye à boire au café pour son anniversaire.

Janvier (27). Absence pour cause de maladie. Sans rapports avec le paragraphe précédent.

Février (7). Malgré le temps frais, je vais jouer au basket avec un camarade de classe sur le playground du stade du lycée. Mes statistiques : 6 points, 6 rebonds, 1 block, 2 interceptions. Bien. Mais ce ne sont pas des statistiques d'arrière ! En ce moment il y a les J.O. d'Albertville. Dire qu'il y à peine deux mois nous n'étions pas loin…

Février (20). Tournoi du lycée interclasse de volley-ball. Je n'ai que mon service pour moi mais je fais quand même le malin. Bal du lycée. Même endroit que l'an dernier, même ambiance, même quête. Trop de dance-music, mais je danse quand même dessus. Hang the DJ.…

Février (28). On se rappelle toute la vie de choses que l'on faisait lorsqu'il s'est passé un événement. Quand Claire m'a téléphoné, je regardais Le nom de la rose. Il était 11 heures. Journée ensoleillée. Elle est venue avec une copine. Un peu le look corbeaux. Je ne l'aurais pas reconnu. Elle, aussi ne m'a pas reconnu. Rendez-vous pris maladroitement dans un café près du château. Elles mangent un croque-monsieur qui a l'air infâme. Je me sens vieux de 10 ans.

Février (29). J'ai rendez-vous avec un ami pour discuter de pas grand chose. Et puis comme ça, d'un coup, on décide de prolonger notre soirée en boite, c'est plutôt moi qui décide de ne pas rentrer de suite, car il a en fait rendez-vous là-bas avec deux superbes blondes. Belle fin de soirée.

Mars (5). Rendez-vous au café de la gare pour préparer un bal.

Mars (10). Nirvana joue à Lyon et je ne peux pas y aller. 80km, école demain..! Dans 104 jours le bac de français.

Mars (22). Je vais voter pour la première fois. Temps gris. Match d'anthologie de basket à la télévision.

Mai (5). J'apporte mes nouveaux dessins en cours. Je me rasais en vitesse et pour ne pas rater le début du match j'écoutais la radio quand le drame se déroula à Furiani.

Mai (6). Bac blanc de français. Derniers réglages. On parle tous du drame d'hier soir. Finale de coupe d'Europe avec Monaco.

Mai (9). J'ai reçois une lettre de mon correspondant d'Allemagne. Comme son père est Américain, il m'écrit en anglais. Il m'envoie une photo d'Andy, un doux dingue, de sa très belle sœur et de sa copine.

Mai (16). Je continue toujours mes répétitions.

Mai (22). Morrissey a 33 ans, l'âge du christ.

Mai (29). Les V.R.P. devaient jouer dans la boite d'à côté. C'était une mauvaise blague.

Juin (4). Je reçois ma fiche d'évaluation : travail fourni normal ; sérieux (selon les matières) ; communication moyenne ; attitude posée ; beaucoup de connaissance "intéressant".

Juin (8). Je commence mes révisions. Mes journées seront rythmées par elles et par les matchs de l'Euro de football.

Juin (16). Bulletin du second quadrimestre : une baisse prévisible dans les matières qui seront abandonnées l'année prochaine, pour le reste je suis toujours appliqué, travail et résultats corrects. Intéressé et pertinent, capable de réflexion.

Juin (24). Oral de français. Bien passé.

Juin (26). Écrit de français. Bien. Je traîne de plus en plus avec Oliver, surtout depuis que j'ai le permis.

Juillet (16). La télévision a la bonne idée de passer la première série de The Avengers. V.O. noir et blanc. Les journées se ressemblent. Piscine quand il fait bon le matin, vélo l'après-midi quand je ne suis pas hors service et je rentre pour suivre la fin de l'étape Tour de France. Je traîne le soir au bout du lac avec des amis. On discute de tout, de rien. On marche dans les hauteurs de la ville. J'aime aussi faire du vélo sous l'orage.

Août (4). Les Jeux Olympiques de Barcelone meublent le temps, avec la natation le matin à la piscine. Avec mon pote on s'amuse à planquer des bouteilles dans le bois sur les hauteurs de la ville, pour aller les chercher le soir venu et, transformer la bouteille en cadavre. Une bouteille de Bailey's à deux c'est écœurant.

Août (8). Je vais voir un camarade de classe. Mes week-ends sont les mêmes. Je m'évanouis dans la nature avec ma bande. On picole mais on reste cool et propre, on va toujours dans la même boite ou dans les mêmes bals. On passe une soirée féerique au sommet d'une montagne, près d'une chapelle : un feu de bois, de la bière, la fête en écoutant Nevermind de Nirvana. Quand le feu est entièrement consumé, il est 2 heures du matin, on redescend pour aller au bal du coin, pour voir la décontraction des autochtones partis étudier dans les grandes villes.

Septembre (11). Rentrée au lycée. Dernière année si tout va bien. Super classe. Un seul nouveau, venant de l'extérieur. On n'est pas beaucoup, vingt et un exactement.

Septembre (21). Premier travail de philosophie. Je craignais le côté abstrait de cette discipline, mais finalement je me passionne pour elle. J'ai un sujet. Sur l'art et les techniques.

Septembre (26). Toujours des répétitions, bien qu'on n'ait pas vraiment de projets de cassettes ou de concerts.

Octobre (5). Rendez-vous avec le conseiller d'orientation. Je ne sais pas du tout ce que je veux faire l'an prochain.

Octobre (20). Premier devoir de philosophie, "technique et idéologie". Je suis très inspiré : 6 pages.

Octobre (22). 14 heures, l'heure des vacances. Le peux tirer le bilan de ce premier mois. Nous sommes les chefs. Aux intercours nous sommes des pachas qui fumons notre cigarette dans la cours, sous les abris. Les intercours sont les moments de retrouvailles avec ceux qu'on connaît et qui sont dans d'autres classes. Nous parlons de la télé de la veille, de résultats sportifs, des couples du lycée… Avec ma bande nous avons aménagé un local. On s'y rassemble tous les week-ends. On n'est pas des méchants. Mêmes si certains ont des tendances cleptomanes.

Octobre (24). Beau dimanche : je marque encore un but et je découvre un nouveau lieu de fête, dans une petite maison, dans la partie basse de la grande rue de LC. Sur fonds de Noir désir (1er album).

Octobre (31). Je vais à Louhans avec mon club, chercher une récompense gagnée la saison dernière, dans le classement départemental des équipes les plus offensives. J'y vais bien que je ne jouais pas la saison dernière. Les invités sont cette année, le sélectionneur de l'équipe de France, Gérard Houiller, et le journaliste Jacques Vendroux. Nous sommes conviés après au match entre Louhans-Cuiseaux et le Gazelec Ajaccio. C'est la première fois que je vais dans ce stade, qui porte encore les stigmates du dernier passage des "supporters" du FC Mulhouse.

Novembre (2). Je fais croire à mon meilleur camarade de classe que Gérard Houiller avait dit samedi devant l'assistance, qu'il sélectionnerait Djorkaeff, le joueur fétiche de mon pote. Je suis un peu salaud quand même !

Novembre (3). Correction du sujet de philosophie. J'obtiens un remarquable 16/20 : très bon travail, pertinent. J'ai "compris ce qu'était la philosophie", ce qui n'est pas rien.

Novembre (13). Les vendredis après-midi au lycée, jadis dédié à Bacchus, sont devenus au fil des mois mornes, ternes. Je rentre souvent après la fin du cours, en voiture. Il y a des traditions qui se perdent.

Novembre (24). Inscription pour le bac enregistrée. Semaine très chargée en travail avec beaucoup de devoirs surveillés.

Novembre (27). Seconde dissertation de philosophie : la conscience de soi-même. Malgré la relative rudesse du sujet, j'en écris encore 6 pages. Pour reposer mes neurones je sors le soir en boite, celle où j'avais rencontré deux belles blondes, il y a quelques mois.

Novembre (30). Nous avons un stage à faire au mois de mars mais nous nous mettons tous à la recherche d'une boite. Nous avons une convention à faire remplir. Je pensais aller dans la boite où j'ai travaillé l'été 1991 mais ils ne prennent pas de stagiaires.

Décembre (4). Bulletin du premier trimestre : sérieux, vif, pertinent, excellent trimestre. Je confirme ma propension à l'expression écrite en philosophie. Je voyais cette matière plus dure, mais en fait, elle est toute bête. Il suffit de réfléchir un peu. On ne fait qu'une année de philosophie, mais cela sert toute sa vie, dans toutes les disciplines.

Décembre (7). Correction de philosophie : 14/20, bon travail.

Décembre (12). Lettre de Mike mon correspondant allemand. Il s'inquiète de l'image de son pays après la vague néonazis actuelle. Il écoute toujours du hard…

Décembre (18). Vacances de Noël. Il n'y a pas de débordements dans les cafés. Il n'y a plus la même ambiance qu'avant. C'est désolant. Mes vacances seront tout sauf extraordinaires : nouveau devoir de philosophie, répétitions, télévision, sortie au local et en boite ou au bal… Je ne sais pas encore ce que je fais pour le 31 décembre.

Décembre (31). Réveillon au local. On mange bien. On boit et rigole beaucoup. Dommage que mes finances ne me permettent pas de poursuivre la soirée avec les autres dans notre boite habituelle. L'entrée majorée pour le réveillon est, je trouve trop chère pour ce qu'il y a à l'intérieur. Souvent il y peu de monde.


1993

Janvier (1). Pourquoi faut-il qu'il y ait toujours des repas de famille le jour de l'An ! Comme l'an dernier je suis un peu dans les vapeurs d'alcool.

Janvier (2). J'ai trouvé de nouveaux musiciens en banlieue. Infidélité ou impression de fin avec le 1er groupe ?

Janvier (4). Je rends mon devoir de philosophie sur l'exigence et la personnalité, avec en cadeau pour la prof la vidéo de L'emprise. Je suis tombé sur un livre de Jim Morrison, An american prayer. Quel claque ! Je note sur mon agenda et des carnets, des extraits.

Janvier (7). En sport, nous allons entre midi et deux à la piscine couverte. Original. Ce n'est pas bien bon pour la santé de ressortir les cheveux mouillés, par ce temps hivernal. Mais c'est tellement bon pour mon genou. J'ai eu des problèmes ligamenteux... J'ai été dispensé de beaucoup d'heures de sport. C'est la première fois que je suis dispensé de sport, l'année où ça compte pour le bac !

Janvier (16). Je répète successivement avec mes deux groupes. Qui peut se targuer au lycée de faire partie de deux groupes de rock ?

Janvier (25). Comme l'an dernier, Cécile paye à boire pour son anniversaire.

Février (4). Saint-Étienne, j'ai du aller voir le médecin des Verts pour mon genou. Un camarade, ancien apprenti footballeur me la conseillé. Le médecin, lui, m'a conseillé d'arrêter le football.

Février (5). On m'a récemment présenté au lycée, une fille qui prends pourtant mon car depuis le début de l'année, je n'ai du faire attention à elle. Nadège. J'avais rendez-vous chez elle pour lui amener un album de Noir Désir. Je l'invite pour le bal que j'organise demain en vue de financer un repas au mois de mai avec mes conscrits.

Février (6). Je profite de la présence de Nadège pour m'éclipser du bal. Je mange exotique chez elle en rentrant.

Février (8). Me sentant sûr de moi, je fais les deux sujets de philosophie : "qu'est-ce qui justifie le respect d'autrui ?" et "un peuple sans histoire peut-il être libre ?". Cela m'inspire. Les révisions commencent pour le bac blanc général.

Février (13). J'accompagne Nadège à Roanne. Pendant le voyage, elle me parle d'un voyage à Venise organisé par la classe d'italien du lycée. Elle dit que ça serait cool d'y aller. Je vais y réfléchir, rapidement car il y a une réunion pour ça lundi.

Février (15). Réunion d'information sur le voyage à Venise. La prof était enchantée de voir que des élèves qu'elle n'a pas en cours étaient partant pour ce voyage.

Février (18). Grosse journée avec la fin du bac blanc et le tournoi de volley interclasse. Tout se passe bien. Sauf que Nadège ne peut plus aller à Venise.

Février (20). Répétitions avec mes groupes. Je sors Nadège au bal où l'on retrouve plein de camarades du lycée.

Février (24). Invité à manger chez Nadège. Je passe beaucoup de temps sur mes sujets de philosophie. Mais j'ai un mois car du 1er au 15 mars je suis en stage. Par contre pour Venise je ne sais pas comment faire.

Février (26). Anniversaire de Nadège. Petite fête chez elle, puis boite habituelle. On créait un nouveau cocktail, le "Nadège", composé de jus de fruit, sirop de grenadine, et vodka.

Mars (1). Je commence mon stage, dans un magasin. Le lundi ce n'est ouvert que l'après-midi. Début en douceur. Il n'y a pas un client. Je me démène à gonfler des sacs de camping.
Je téléphone à Nadège pour qu'elle m'aide en philosophie.

Mars (6). J'achète dans un magasin de surf un gigantesque sac de voyage. Je me suis décidé pour Venise. J'y vais. Je retrouve le soir, mes deux meilleurs camarades de classe au bal. On s'échange des nouvelles sur les stages respectifs que l'on fait.

Mars (8). Au début de cette seconde semaine de stage, je commence à me lasser des trajets quotidiens. De la routine de 7 heures du matin jusqu'à 20 heures le soir. Les journées sont les mêmes. Ca doit être ça le travail quotidien.

Mars (15). Retour au lycée après un mois. Je rends ma copie de philosophie, récupère ma cassette de L'emprise. La prof d'italien m'apprend qu'elle passe un film vendredi sur Venise. Je pique nique avec quelque uns de ma classe à midi. Nouveau devoir à philo.

Mars (19). Encore un pique nique. Et puis le documentaire sur Venise que j'ai déjà vu à la télévision. J'ai un rapport de stage à faire.

Mars (24). Je pars dans moins d'une semaine. Aussi, vais-je chez le coiffeur. Je fais rapidement le rapport de stage.

Mars (29). J'apporte mon rapport de stage, je dois le taper sur ordinateur, je ne sais pas où ? J'amène aussi mon dictionnaire de philosophie. Je reçois avant de partir mes devoirs de philo : 14 et 15/20.
Nous prenons un premier train en fin d'après-midi. Et puis un second de nuit, avec couchette. C'est la première que je vais passer la nuit dans un train. C'est comme dans les films sauf qu'on est six par compartiment. Je dors au dernier "étage" avec pour voisine d'étage la prof. J'ai du mal à m'endormir. Mon premier train de nuit…

Mars (30). J'ouvre les yeux peu avant 8 heures. Le train traverse la fin de la Vénétie : Vicenza, Padova, Mestre. Je vois les gens sur les quais avec leur cartable, les étudiants, les employés. Ils ont tous des petites lunettes de soleil et des anoraks. Le train s'arrête en gare Santa-Lucia. Le soleil s'est levé. En sortant de la station, surélevée, c'est le choc immense qui m'envahit. Une vision irréelle d'un panorama vu dix milles fois à la télé ou en photo. Une impression difficile à expliquer. On entre dans un monde diffèrent. Unique. Pittoresque. On prend un café. Nous allons vite prendre connaissance de notre hôtel, de nos chambres. Et puis l'aventure, il n'y a pas d'autres termes connu, commence. Tout est nouveau, tout est diffèrent. Même du reste de l'Italie, selon la prof.

Mars (31). Musées, églises, musées, églises. Mais je ne m'en lasse pas. Du moins des musées. Il y a tellement d'œuvres universellement connus. Je demande à un gardien qui lit La gazetta dello sport, où en est la "squadra di Venezia". Malins, les restaurateurs parlent tous au minimum quelques mots de français. Ils voudraient tous qu'on les paye en francs. Bien sûr. Quelle balade dans ces ruelles, ces places, ces petits ponts sur ces canaux qui se ressemblent tous ! Il serait si facile de se perdre. Pont des soupirs, place Saint-Marc, tout le classique y passe. Toujours le soleil. Il n'y a pas trop de touristes, c'est juste avant le déferlement. On ne voit pas beaucoup de Vénitiennes. Il paraît que ce n'est pas la ville idéale d'Italie pour nous les hommes, si l'on vient pour la drague.
Nous allons sur la plage du Lido. Je me dis qu'au loin, après l'horizon, il y a la guerre en Yougoslavie, que je n'ai jamais été si près d'un conflit armé. Cela fait bizarre. Cette plage du Lido … Certains s'y trempent les pieds. Mais quel pied cet endroit! Derrière nous le palais du festival cinématographique de Venise. Devant l'Adriatique. Que demander de plus ? C'est un endroit féerique, encore plus que le reste de la cité lacustre. Cette grande avenue bordée d'hôtels faisant face à la mer. La tranquillité personnifiée. La prof me parle d'un film que je que connais que de nom, Mort à Venise, où la scène finale a été tournée sur cette plage.

Avril (1). Tour en bateau, shopping. En ce début de printemps, le soleil ne nous aura jamais fait faute. Venezia, Mestre, Padova, Vicenza, Verona (on évoque bien sûr un couple célèbre et un balcon), Brescia (prononcé apparemment "Brétchia" et non "Brécia"), Milano où nous changeons de train. Sans couchette…

Avril (2). La nuit de sommeil fut inexistante : dix malheureuses minutes avant le changement de train. De retour au lycée, je crois devenir fou. J'ai la sensation que tout le monde parle italien ! Chaque petit groupe de discussion semble s'exprimer dans la langue de Dante.

Avril (4). Je me sens vraiment très bizarre depuis mon retour en France. Un tel voyage, tout ce qui s'est passé. Je sens le vide autour de moi. J'appréhende le retour au lycée. Non pas en raison du bac blanc, je n'y pas pensé une seconde à Venise. D'ailleurs je crois que je n'ai pensé à rien là-bas, comme si mon cerveau était déconnecté. Seuls mes yeux pensaient, devant de tels spectacles. Mort à Venise, c'est bien ça.
Je vais au stade où un camarade de classe joue contre mon ancien club.

Avril (5). Bulletin du second trimestre : ridicule petite baisse en économie (cela doit être logique d'un point de vue des sciences économiques).

Avril (6). Le bac blanc approche à grands pas. Ce voyage m'a vraiment fait du bien. Le cerveau à pris l'air de la mer. Impeccable. Oxygénation totale. Il y a un match de football entre un club français et un club italien. Mon cœur balance.

Avril (8). Je pète un câble ou inconsciemment je bluffe. Je déclare ma flamme à une personne que je vois plusieurs fois par semaines, N, qui m'a enivré. Comment ai-je pu tomber amoureux d'elle alors que je me suis dis si souvent que c'était bien la dernière chose à faire, surtout avec la perspective du bac ? Je vis dangereusement. Heureusement que je suis devenu son complice et que cette histoire restera dans l'ombre de l'Histoire.

Avril (13). Que se passe-t-il après une épreuve du bac blanc ? Je vais récupérer mon rapport de stage, tapé par N sur son ordinateur. Chez elle nous avons reparler de mon désarroi de jeudi dernier, quand elle ma ramené chez moi. Fatigué par la tension des différentes épreuves, écrites et psychologiques, traversées depuis une semaine, je m'écroule sur son lit. Elle fait de même. Et on s'embrasse, nos lèvres se rejoignant, nos esprits le suggérant, simultanément. Je suis parti dans une autre dimension. Mais cette relation, je le sais, ne sera pas facile à gérer.

Avril (14). Le lycée organise pour les élèves de terminale une sortie sur le campus universitaire. J'ai franchement la tête ailleurs. Mais je me sens bien en pensant à ce que j'ai vécu hier, en me disant que je revivrai cela demain après-midi. Je cultive un sentiment de puissance, de supériorité sur les autres.

Avril (15). Elle a brisé notre idylle. Deux jours. Cette fois c'est d'en face que vient la décision de stopper là cette liaison dangereuse. Mais je ne l'accepte pas comme ça. A quoi ça rime ? Je suis encore tombé sur une timbrée. Pourquoi je n'attire que des tarées ? Le titre de champion d'Europe de Limoges à un goût bien amer.

Avril (16). Je revois N avant d'aller en cours. Elle m'offre pour me consoler son briquet tempête. Il a pris son odeur, je m'en enivre. Maladivement. L'odeur de sa voiture, l'odeur de la vanille. Elle m'a par surprise. Elle me déconcerte. Je dois avoir l'air étrange aux yeux de Geronimo et des autres de ma classe. Je deviens paranoïaque. N'ayons l'air de rien même si c'est très difficile. Aujourd'hui les vacances de Pâques débutent mais je ne crois pas que les fêterai comme les autres fois. Elle me dit qu'elle m'écrira pendant les vacances et que peut-être, elle viendra me chercher pour qu'on se balade dans la nature. Ces vacances tombent finalement bien.
Ce soir je suis allé en boite avec Nadège. Mais je n'allais pas très bien. Ca se voyait, et je ne suis pas du genre à cacher mes sentiments quels qu'ils soient. J'aurais mieux fait de rester chez moi. Nadège m'a réconforté. Elle est ma confidente en chef depuis une semaine et les "événements".

Avril (17). Je reçois sa première lettre. Je la dévore comme si c'était elle que je dévorais. Paroles, paroles : elle se pose des questions existentielles. Moi aussi.

Avril (18). Je lui écris. Avec passion et déraisonnement.

Avril (21). Nouvelle lettre d'elle. Elle répond à ma lettre. Je lui manque. Elle me flatte du premier au dernier mot. Elle s'est attachée à moi.

Avril (23). Elle vient me voir pour la première fois chez moi.

Avril (25). Elle est revenue me voir. On fait un tour dans la campagne avoisinante. A nous écouter, nous nous supprimerions. A quoi ça sert de vivre si c'est pour travailler toute sa vie ? Il n'empêche que ces remarques me troublent. On est monté dans ma chambre. Llyod Cole et beaucoup de commotions.

Avril (27). Nouvelle lettre de N. Elle est malade mais pense énormément à moi. Elle m'envoie des idées pour ma dissertation. Je crois que mes superbes notes de philosophie l'ont marqué. Notre histoire semble vouloir continuer.

Mai (1). Banquet. Long, il a fallut se taper la messe, les fleurs sur les tombes, la pluie, et pour couronner le tout, N ne peut pas venir.

Mai (10). Je pense à mon avenir en études supérieures. Je choisis une voix, sur les conseils appuyés de N. La note du dernier devoir de philo est de 15/20, à deux c'est pas mal. Mais sur un commentaire de textes, je bas mon record, 18/20, laconiquement, "très bonne synthèse".

Mai (13). Vu mes dispenses en sport, je dois pour le bac, composer une dissertation sur le sujet sportif de mon choix. La note du bac blanc philo : 13/20, corrigé par l'autre prof de philo, commentaires illisibles.

Mai (14). On se donne rendez-vous au café du quai. On parle de nos futures occasions de se voir, de passer des nuits ensemble. Vivement l'an prochain, notre indépendance.

Mai (19). Je vais au restaurant avec mon amour. Nous allons voir Nadège après.

Mai (26). Les derniers jours n'ont pas produit de choses sortant de mon désormais ordinaire. Une double vie. Ce soir Marseille a gagné la première coupe d'Europe pour la France.

Mai (27). Nous nous évadons dans la ville voisine, dans un café. Nous jouons au flipper. Nous buvons un café. Grillons trop de cigarettes. Je l'invite à manger en amoureux, chez moi dimanche, à midi.

Mai (30). Seul à la maison, je peux en profiter pour la recevoir. Je lui avais préparé un succulent repas, et beaucoup de gâteries, ces instants là resterons à jamais dans nos mémoires.

Juin (1). Je m'inscris en fac. Je prévois avec N une nuit, échappée nocturne, pour le dernier jour de ma vie au lycée.

Juin (2). Bulletin du dernier trimestre : très grande année, des capacités intéressantes et pas que boire de la bière ou des alcools blancs. Belle régularité. Je deviens très pertinent. Grâce à la philosophie qui permet d'approfondir sa pertinence. Ils ne se sont doutaient de rien.

Juin (3). Avant-dernier jour de classe. C'est de même la fête du lycée, avec diverses activités. C'est une soirée excitante en perspective avec N. On s'est donné rendez-vous vers 17 heures, sur la route menant à notre évasion. Nous allons dans un hôtel autoroutier pour prendre une douche et déposer nos nécessaires. Derniers instants de répit avant d'attaquer les révisions finales pour le bac. Nous allons dans une pizzeria puis retournons à l’hôtel. A la télévision on joue American graffiti, que je n'ai jamais vu. Je le vois la tête à l'envers, étendu sur le lit, attendant N. Et puis elle vient.

Juin (4). Cette dernière journée de classe est inoubliable. J'ai encore la tête à cette nuit, à tous ces moments. Mon corps le ressent. Je dois paraître une nouvelle fois étrange à certains. S'ils savaient ma nuit que j'ai passé. Mais maintenant, après le plaisir, le travail m'attend.

Juin (7). Je passe l'épreuve de dessin. Sans pression, seuls les points au-dessus de la moyenne comptent.

Juin (11). Je passe la philo. Ca s'est bien déroulé. J'ai déroulé. Je vois N qui m'invite à dîner au restaurant le soir. Encore un ultime instant d'intimité, en amoureux.

Juin (16). Rendez-vous à 14h30, pour un boulot dans le secteur commercial. Je sens le coup fourré. Nadège pense comme moi, avec l'expérience dans cette même boite en plus. Je dois trouver un job pour cet été.

Juin (19). Avec N, nous allons à la fête de la musique, voir un groupe que nous connaissons, mais que je trouve amateur. Première divergences de point de vue. Je deviens de plus en plus jaloux, et insupportable quand des hommes lui parlent.

Juin (26). Les épreuves du bac se sont terminées à 20 heures. Je bouffe avec des camarades. Je n'ai pas vu mon amour depuis trop longtemps. Je deviens irascible. J'attends de ses nouvelles en même temps que j'attends mes résultats du bac.

Juin (28). Il fait un temps pluvieux. Je décide de me faire une journée Guerre des étoiles. Je visionne les trois films. Encore quatre longues journées d'attente. Ca devient très éprouvant nerveusement. Je suis obligé de prendre des tranquillisants. Toujours pas de nouvelles de N. Je vais devenir fou.

Juin (30). J'avoue qu'aujourd'hui, j'ai pété les plombs. Mais je ne sais pas si cela vient de l'attente des résultats du bac ou de ma liaison que je vis actuellement.

Juillet (2). J'ai le bac, avec mention. Il a fait beau toute la journée. J'aurais aimé que N soit là pour partager ma joie immense. On ne vit sa qu'une fois. Ca gâche un peu mon ivresse. Mais je l'ai vu.

Juillet (3). Je vais changer de club à la rentrée. Je vais au méchoui de ce nouveau club. Je confirme mon inscription en faculté. N me contacte, on se donne rendrez-vous lundi après-midi.

Juillet (5). Elle et moi profitons de nos retrouvailles pour rattraper le retard accumulé depuis plusieurs semaines. Elle me dit qu'elle sera partie souvent pendant ces grandes vacances. Moi qui voulais qu'on aille à la mer ensemble…

Juillet (6). C'est l'adieu au lycée. Je ramène mes livres.

Juillet (7). Je me suis inscrit dans deux villes différentes, dans deux sections. Je n'ai pas encore décidé où j'irai.

Juillet (9). Nadège a loupé le bac, mais elle organise quand même une petite fête chez elle. Après, le Mamba nous réceptionne dans un état proche de l'Ohio.

Juillet (13). N est partie en vacances en famille. Je flirt avec une jeune italienne Je sens tellement que mon amour est parti pour de bon, est parti tout court.

Juillet (14). Soleil de plomb et goudron qui fond. Je revois dans cette fournaise Stefany, avec qui j'ai flirté hier. Elle était avec sa tante. Elle a fait comme s'il ne s'était rien passé hier, peut-être à cause de sa tante. Je la revois le soir au club. Nous mettons fins de façon bilatérale à notre relation.

Juillet (15). Je me fais une soirée Liverpool, en vidéo. Je n'ai rien trouvé comme job d'été.

Juillet (19). Sur mon agenda, je change la couleur de mon encre : noire à la place du bleu. Je porte le deuil de mon amour que je sens partir de travers. Je vais les matins à la piscine, et l'après-midi, je me balade en vélo. Je vais au bal avec mes meilleurs amis de cette dernière année de lycée.

Août (3). J'ai trouvé du travail en intérim pour cette semaine, dans une usine. Ce soir c'est la reprise des entraînements du football.

Août (6). J'ai fini mon boulot. Nadège me présente une de ses cousines. Une superbe blonde, de passage dans la région. Je crois qu'elle comprend que mon amour bat de l'aile.

Août (7). Enfin des nouvelles de N. Au soleil. Chez sa sœur. Elle m'appellera quand elle sera de retour ici.

Août (31). Elle devait me joindre aujourd'hui, pour me faire visiter son nouveau chez soi. Elle m'a oublié ?

Septembre (2). On m’avait envoyé ma convocation d’inscription à la Fac. Je laisse ma voiture à la gare, je monte dans le train et j’arrive une heure et demie plus tard à Dijon. Je retrouve cette gare que j’avais quitté en revenant de Venise. Evidemment je pensais continuellement à N.
13h30, inscription définitive à la faculté de droit. Découverte d'un nouvel univers, fascinant, fascisant. Il règne une chaleur insupportable. Comme étant ponctuel, j’ai eu le temps de faire accoster par une créature de taille mannequin et sourire de lobotomisé. Une créature d’une mutuelle étudiante. Et bla-bla-bla... C’est facile de se faire berner quand on débarque. Moi je débarquais. Après l’inscription, je repartais à la gare.
Il s’est passé un truc ce soir. Le fait est que pour moi, l'histoire avec N est fini ce soir.

Septembre (5). J'étais sortis la veille, couché à 4 heures du matin. Et à 9 heures 30, je devais disputer un match d'entraînement, en plein soleil. Déjà que j'avais soif... De 10 à 12 heures, le soleil atteignait son zénith et moi je souffrais de la chaleur. A la fin de la partie, on m'invita à l'arrosage de l'anniversaire de l'un de mes coéquipiers. Nous étions cinq. On m'avait dit que ce ne serait pas long et je pensais donc rentrer vers 13 heures. On m'avait dit... Hélas, je m'aperçut trop tard, bien trop tard que cela dépassait les limites. Une bouteille tout seul, la moitié pour N… Je me suis laissé aller peut-être à cause d'elle. C'est une belle excuse.

Septembre (9). J'essaye de revoir N. Je retourne donc rôder autour de mon cher, ancien, lycée. C'est ma fête. Je la vois enfin. Elle fait l'innocente. Moi, j'ai un paquet de Camel sans filtre. Je lui fais la comparaison avec Mickey Rourke car Angel Heart était passé à la télé. Elle me fit remarquer que je prenais une mauvaise attitude, elle qui m'avait initié aux Benson and Hedge. Mais maintenant, elle pouvait toujours causer. Tout ce qui m'arriverait serait de sa faute, ou du moins sous son influence.
Elle me montre sa demeure, charmante comme elle. Non, en fait, c'est du neuf et je déteste ce qui est neuf, le côté préfabriqué, sans histoire, sans passé, cela n'a aucun intérêt à mes yeux, c'est du vide. Cela tombait alors bien. Il ne se passa rien, pas de touchés, pas de caresses, pas de baisers. C'était somme tout logique, notre liaison était bien achevée. Ma dernière lettre contenait des sous-entendus sur la suite à court terme de notre liaison. Vu qu'elle ne m'avait pas prévenu de son départ à la mer, je lui écrivis que notre belle histoire l'était de moins en moins à mon goût, qu'elle avait du plomb dans l'aile. Elle pris cela pour un signe de rupture. Je crois même avoir souligné que je posais la question de savoir si je ne devais pas chercher quelqu'un de mieux, quelqu'un qui me montre un peu plus d'amour. Elle me parla de la fac, que c'était bien, que j'allais m'éclater, évoquant ses souvenirs, pour moi douteux, comme tout ce qu'elle disait désormais. Elle essayait de me gruger une fois de plus. Elle me dégoûte.

Septembre (12). J'aurai dû aller hier à Saint-Étienne, avec l'animateur des nuits du Biblos, histoire de le voir à l'œuvre. Je n'aurai pas joué au football, j'aurai du.
Dix jours se sont écoulés depuis ma trop fameuse inscription à l'université. Dix jours où je ne vois pas très bien le sens de la vie. Aujourd'hui il fait beau. Chaud, ensoleillé comme aime la plupart des gens. Moi quand le thermomètre atteins plus de 25 degrés, je me plains. S'il pleut, s'il grêle, s'il neige ou si le temps est simplement gris, brumeux, je suis heureux.
Aujourd'hui, je devais disputer le match d'ouverture de la saison de football. Seulement, je n'en eu pas le temps. Huit minutes de jeu et je me blesse gravement au genou. Je viens de perdre beaucoup de choses en peu de temps. J'ai l'impression d'être sur une mauvaise pente, dans une mauvaise direction. Après une blessure viscérale, vient une blessure physique. Je dois porter des béquilles pendant une semaine, pour la première fois.

Septembre (15). Ma semaine est rythmée par les tentatives de la retrouver et mes rendez-vous chez différents médecins. Pour me changer de mes idées noires, je suis invité chez Nadège pour manger. Soir de match de Coupe d'Europe. J'essaye de convertir Nadège aux joies télévisées du football. C'est un beau match, tant mieux. Cette soirée me fait du bien. Je suis prié de me rendre ce week-end avec son mec dans la boite où il a trouvé depuis quelques mois, une nouvelle place. Je verrai selon l'état de mon genou. J'ai moins mal, j'ai des compresses. Il m'en faudrait aussi sur le cœur.
Avant d'aller chez Nadège, j'avais donné rendez-vous à N chez moi. Je vivais le moment présent avec la pensée de la revoir, le lendemain. Bien sûr, une fois de plus elle m'ignora royalement. Vivement l'automne, saison des amours morts, des âmes mortes.

Septembre (23). Je me fais de nouvelles connaissances, dont Muriel que j'avais ramené du lycée quelques jours auparavant, qui partageait avec moi, mais peut-être ponctuellement, une passion pour les Beatles. J'échange des albums avec elle, aussi The wall de Pink Floyd. On s'est rencardé pour le lendemain soir au Mamba. Je passe chez une autre. En cachant mes déboires. J'ai passé beaucoup de temps à rôder dans le quartier du lycée, et ne pas voir N me mine le moral, je frise l'instant de folie. Je l'aime encore.

Septembre (24). Pour tuer le temps, j'essaye une nouvelle voiture. Je suis allé faire un tour à Roanne, rôdé avec Oliver et Fernando. Je passe tous mes vendredis et samedis soirs dans notre local, puis le plus souvent nous terminons au club ou au bal. Mon genou me faire toujours un peu mal, mais je marche normalement.

Septembre (27). Mon coiffeur est extraordinaire. La légende, selon Oliver, était qu'il parlait en anglais à certains de ses clients. Je devais être un client trop récent pour qu'il prenne la liberté de s'exprimer avec moi ainsi.
Dans une semaine, j'aurais repris les cours à la fac. Je profite de cette dernière semaine comme je peux. Je retourne à Wittmer et je revois quelque uns de mes meilleurs camarades de classes de terminale. Je mange avec Geronimo au self du lycée, ce qui me fait drôle. J'étais content de le revoir et son invitation m'a fait chaud au cœur. On est allé chez lui, une maison calme, à la campagne. Comme celle de mes parents que je rêve d'habiter de nouveau. J'en rêve la nuit, des fois. Mais le réveil après ce rêve est dégouttant.

Septembre (30). Le moi de septembre touche à sa fin. Ce dernier jour correspond à mon emménagement dans mon studio à Dijon, sur le campus. Mon retour dans cette cité bourgeoise et froide, un mois après, est très contrasté par rapport à ma dernière visite.
Il faisait gris et j'avais quitté mon village vers 9 heures, accompagné d'Oliver et d'Alain B, étudiant en Economie, pote aussi à Thierry. L'étudiant rejoint sa demeure, je découvre la mienne. J'ai la meilleure vue de tout l'immeuble. Quatrième étage. Vue sur la ligne d'horizon dessinée par le campus. Superbe couché de soleil. Evidemment la fac parait immense, comme toute chose que l'on découvre, et elle diminuera progressivement.
Puis il fallut aménager l'appartement, s'acclimater. Les mûrs de mon studio me bloquaient pas seulement physiquement, mais aussi psychiquement. Aussi, je m'empressais de couvrir les murs de posters, de photos, d'affiches, de messages et de divers trucs. Oliver fit un tour en ville et rentra le soir trempé comme un rat, après une grosse averse.

Octobre (1). Mes débuts avec la fac ont failli être retardé. En effet, étant donné que j'ai toujours la bonne habitude d'oublier quelque chose quand je pars plus d'un jour de chez moi, j'avais laissé à la maison le plus important, le réveil. Je me suis donc contraint à dormir avec le store ouvert pour pouvoir me lever en même temps que le soleil.
J'étais excité à l'idée de mon entrée dans le monde estudiantin. Je pensais à pas grand chose, surtout pas à N, et c'est mieux comme ça. Je quittais mon appartement et Oliver, partant à l'aventure. Il pleuvait comme la veille. Décidément, Dijon valait bien son climat gris et froid qu'on m'avait conté.
9 heures, je me rendais à la faculté, traversant tout le campus. L'architecture des bâtiments est exactement comme le temps. Journée de présentation. J'arrive dans un grand amphithéâtre, et trouve place à côté d'un des rares grunges de l'assistance. Il vient de l'Ouest de la région. Dans une section de 1000 étudiants, on a fait des petits groupes d'une vingtaine. Personne que je connais sauf deux filles qui étaient au lycée, dans des classes supérieures aux miennes. Elles ont du musarder en route. Il y a d'ailleurs beaucoup plus de filles que de garçons. Je fais équipe pour un exercice de présentation à deux avec une fille qui s'appelle Schubert, mais je ne sais de quel instrument elle joue. Je rentre déjà chez moi, la semaine ne se résumé qu'à cette journée de consignes.

Octobre (2). Fête chez le Grec. Un ami d'un ami. Perdu en pleine campagne. Pas de femmes, pas terrible comme fête. Heureusement, il y avait une fête géante retransmise à la télévision.

Octobre (4). C'est la vraie rentrée universitaire. Tous les rapaces nous attirent pour prendre nos sous : associations, mutuelles, etc. Nous découvrons de grands amphithéâtres de 2000 places. Impressionnant. Cours de droit, d'économie, principalement. Le prof, un vieil éphèbe, me fait penser à Lambert Wilson. Et Radio Campus ? Avant la rentrée, depuis que je savais qu'il y avait une radio sur le campus, je me voyais déjà faire une émission un peu comme dans Pump up the volume, un de mes dix films cultes. Ce serait le soir, de 22 heures à minuit. Hélas, il est déjà bien trop tard pour postuler à une émission. Toutes les plages du soir sont prises. A la limite, j'aurais pu un après-midi, mais seul le soir me plaisais.
A la fin du cours, l'amphithéâtre, loin d'être rempli, dégueula les 400 étudiants qui s'y tenaient. A 14 heures, ma journée était déjà finie.

Octobre (7). Ces premiers jours de fac sont amputés des cours de travaux dirigés. De ce fait, je n'ai aucun cours aujourd'hui. J'en profite pour me faire installer une ligne téléphonique. Je dois attendre un mois et demi pour la mise en connexion de ma ligne. Ce qui me bloque dans certains projets.

Octobre (11). Mes week-ends sont passés avec ma bande. Je suis allé au Mamba. Je rentre sur le campus le dimanche soir vers 22 heures, après un long voyage en train. Je ne vois le jour que le lundi matin sur ce campus.
Aujourd'hui, deux rendez-vous avec deux nénettes. Je me dois de trouver une Anglaise pour parfaire mes textes. Je me suis inscrit à l'association des étudiants de ma section et au journal qui en dépends. J'ai vu l'annonce d'une qui cherche des personnes pour parfaire notre langue... Elle s'appelle Sarah, travaille sur des bateaux mouches. Je dois la rappeler bientôt.

Octobre (13). Je n'ai pas encore la télévision dans ma chambre. Je suis le début du match de ma salle de bain. Cela me fait une impression d'être coupé du reste du monde. D'être inférieur à tous les autres. Surtout ce soir, où je dois être la seule personne au monde à ne pas voir le désastreux France - Israël. A la radio c'est encore plus stressant. 13, ça porte malheur ? Un nul suffisait ! Honte sur nous. J'espère que l'Angleterre ira, elle aux Etats-Unis.

Octobre (14). Première soirée organisée par ma section. Je ne suis pas dans mes chaussures, dans mes bottes. J'y vais quand même, ayant trouvé deux compagnons pour picoler un peu. Un truc écœurant, genre crème de coco. La boite se nomme l'An Fer, porte bien son nom. Il y fait chaud.
J'ai sympathisé avec Stef, une fille qui était dans mon groupe lors de la journée de présentation. Nous sommes dans des groupes de travaux dirigés différents mais nous nous voyons le reste de temps.

Octobre (18). J'ai téléphoné à Sarah et elle me dit qu'elle n'a plus besoin de moi. Je cherche aussi à m'inscrire à l'unité de valeur théâtre. Stef, aussi est intéressée par le théâtre. On a cherché ensemble le lieu où l’on doit aller pour s'inscrire mais on ne l'a pas trouvé. On va à droite et là on nous dit d'aller à gauche. Et inversement. L'affaire tourne à l'eau de boudin.
Je profite des moments de liberté pour aller chez un disquaire. Je flâne. J'ai bien raison. Pour tuer le temps j'écris à N, et à d'autres copains copines.

Octobre (21). Je vais voir des anciens du lycée dans leur résidence : Charly, Carine, David, qui me présente à d'autres, Cédric et Marco. On boit un peu. Soirée médecine dans une grande salle. Ca ressemble plus à un bal qu'à une soirée ordinaire. C'est donc ça la débauche estudiantine !

Octobre (25). J'écris à mon ancienne chérie. Pimenté.

Octobre (27). C'est le bizutage. J'étais au courant, par un opportun délit d'initié. Autre chose qu'au lycée, beaucoup plus sadique. Pour remercier tous les participants involontaires, nous sommes conviés à une nouvelle soirée en boite. Une bouteille de champagne m'attendait chez moi, avant d'aller avec mes deux Mâconnais dans la même boite que l'autre fois, pour une même soirée de dupes.

Octobre (28). Mon ancienne chérie me répond. Pimenté. Je devrais arrêter de me plaindre, de faire le désœuvré. Elle ressent mon mal-être. Elle est prête à m'aider à le surmonter.

Novembre (2). Le mois de novembre est l'un des plus triste. Hier la Toussaint, aujourd'hui le jour des défunts. Je participe à l'annuaire de ma section, histoire de rencontrer de nouvelles têtes. Je suis humble rédacteur. Aujourd'hui il y a une réunion pour préparer le premier numéro. J'amène des journaux du lycée pour donner des idées de directions. Un type, Christophe de Nevers, a l'air de d'être une tête. Il est nommé rédacteur en chef, poste qu'il occupait déjà dans son lycée. Je sens naître en moi une vocation de journaliste.

Novembre (4). Je vais voir un docteur spécialiste en médecine du sport car mon genou s'est remis à enfler, et je ne peux toujours pas le plier. Je sens même le ménisque bouger. Il me fit un retrait à l'aide d'une grosse seringue, d'un liquide qui forme l'enflure, diagnostiquant un épanchement de synovie. Il me donne un rendez-vous pour une autre piqûre, dans quelques jours. Il me dit que ça devrait aller.

Novembre (5). Bande et Mamba pour couper de la vie étudiante. Je raconte ma semaine. Je fais un tour au café, histoire de mater avec Pol. Et puis, je me couche.

Novembre (7). Malgré des terrains lourds et boueux, je continue à jouer au football sur une jambe, avec un genou.

Novembre (11). Je ne rentre pas à la maison car on a cours demain, vendredi. Hier soir, j'ai fait la fête avec les anciens de mon lycée. Nous étions neuf dans 15 mètres carrés. Puis après, nous sommes allés en ville, pour nous dégourdir les pâtes.
Mes amis voulaient aller dans une rhumerie, et moi plutôt en boite. J'y allais donc seul. Une soirée organisée par les rivaux de la faculté de droit. J'ai retrouvé des copines de mes travaux dirigés, de l'association des étudiants de ma section. Et aussi Lolo que j'ai capté dans le centre commercial dans lequel est situé la boite. J'ai trouvé un parrain pour ma faluche. Je vais faire parti de cette confrérie d'étudiants. Le baptême a lieu dans 15 jours. La salle était tellement bondée qu'on ne distinguait plus les bords de la piste. Ramené par Lolo et ses amis. On est allé aux croissants à 3h30. Puis, je me couche dans mon appartement, sans télévision, sans personne.
Aujourd'hui, me rappelant de ce que j'avais fait la veille, je me suis précipité devant la glace de ma salle de bain. Je constate une marque bénigne à l'œil. Il devait être 11 heures quand j'ai émergé. Je déjeunais une heure plus tard. Je fis un peu de ménage. Ayant le téléphone depuis peu de temps, j'ai téléphoné à Stef, qui m'a dit qu'elle allait à la Foire Expo. Et moi, comme un con, je lui ai dit que cela ne m'intéressais pas, préférant aller au lac Kir.
C'est la première fois que je m'y rendais et pour la première fois depuis des années, il faisait beau un 11 novembre. Je me suis tout de suite aperçu que cet endroit était un repère de gens louches : des dealers, des prostitués, des hommes qui me regardaient de façon tendancieuse. Alors que j'aurais pu rejoindre Stef! Un type m’a pris pour un légiste à cause de ma chemise que je tenais à la main. Je pris vite le premier bus qui vint, et fit du lèche vitrine au centre ville. J'étais bien content de rentrer dans mon studio. Manger, écouter la radio, dormir. Triste 11 novembre finalement.

Novembre (16). Deux réunions. L'assemblée générale de l'association et du journal.

Novembre (17). Soirée à marquer d'une pierre noire. La France jouait ce soir sa qualification pour la coupe du monde de football, contre la Bulgarie, à Paris. Je devais poursuivre ma soirée dans une soirée Beaux-Arts. Je me souviendrais toujours de ce match, d'où je l'ai regardé (dans une résidence étudiante), de l'ambiance, fiévreuse. De l'épilogue, désastreux. Cette dernière seconde de jeu, du coup franc raté du beau David, à la frappe de Kostadinov. De l'incrédulité suivant cette action finale. Nous n'irons pas aux États-Unis alors qu'il suffisait d'un point lors des deux dernières rencontres à domicile. 17 novembre et 13 octobre sont sources de beaucoup de similitudes. Un même temps, typiquement britannique. Pour couronner le tout, les Pays-Bas éliminent l'Angleterre.

Novembre (18). Il faut affronter les autres. Vite ! J'organise une petite "fête" pour oublier hier soir, dans mon studio. J'invite les anciens du lycée. Je vois débarqué avec surprise d'autres filles du lycée, dont une qui était avec moi en 1ère. Grosse bringue, et je suis content que tout le monde ait aimé. J'aime toujours que l'autre prenne du plaisir, mon cas n'étant que secondaire. En toutes circonstances.

Novembre (20). Pour oublier encore un peu plus le désastreux 17 novembre, j'accepte l'idée de rejoindre ma bande à l'anniversaire d'un copain d'un entre-nous. A Belleville. Cette fête ressemble plutôt à un bal qu'à un anniversaire : on paye à l'entrée mais on peut boire à volonté. On ne connaît personne et on finira la soirée sans connaître personne. On nous avait annoncé des filles branchées et de la musique indépendante...
J'ai reçu hier une carte postale on ne peut plus laconique de N : "salut".

Novembre (20). 19h30. Encore ce foutu train à prendre, qui arrive à 21h40 à Dijon… quand il n'y a pas de retard. Le pire je crois, c'est la bataille pour monter dans le bus qui dessert les facultés. Cela me rappelle assez la bataille quand je prenais le bus les matins, pour aller à Wittmer pendant 4 ans. C'était un furieux combat à 7 heures du matin, et pourtant cela me manque, un peu. C'est surtout le lycée qui me manque. Maintenant, cette bataille me prend la tête, et c'est amplifié par le blues. Pourtant, ce dimanche, je suis heureux. J'ai mon baptême dans trois jours, et cela me rempli la tête. Une bringue, la bringue de l'année en perspective.

Novembre (24). Ce soir c'était le grand soir, l'intronisation. Une beuverie comme je n'en avais jamais connu. J'ai fait des achats pour fabriquer ma faluche, comme j'ai décidé de rejoindre la confrérie de ma section, avec tout le cérémonial qui s'en suit et avec Stef qui maîtrise plus que moi le sujet couture. J'ai passé la journée à ses côtés dans les amphis. On pensait au baptême, on avait la tête ailleurs. Elle finissait de coudre sa faluche, et manque de chance, elle avait attrapé la crève. Elle était sous médicament. La journée passa vite. Echange avec un camarade d'amphi sur des albums de musique dite "techno". Apparemment, je ne connais pas les vrais valeurs de cette nouvelle musique.
Le restaurant marocain où se déroulait la cérémonie était située dans une ruelle sombre. Le brouillard plongeait la cité ducale dans une atmosphère londonienne. J'aurais préféré d'ailleurs être à Londres ce soir là. On prend place, on a faim. Stef a ses antibiotiques. Des coutumes du genre manger son protégé avec les mains, original mais non pratique avec un couscous. Puis chacun doit chanter une chanson paillarde, plus ou moins. On lance des défis et on dérive. Une étudiante, très enivrée commença à… On atteignait le sordide. Le dessert passa tellement vite qu'il me passa sous le nez. Puis, le sermon pour finir la soirée au restaurant. Je me retrouvais dehors en caleçon, contemplant Isa, nouvelle faluchée, pissant dans la rue. Elle avait baissait son pantalon devant moi pour se soulager sur les pavés qui serait foulés demain par des centaines de personnes. Le président de l'association nous invita à revenir à des dispositions réglementaires vis à vis de la marré chaussé qui rôdait non loin. Cela aurait été bête de finir au poste.
La fin du spectacle se déroulait dans la même boite que celle où je m'étais perdu le 10 novembre. Autre ambiance, bien entouré. Je dansais sur les plots avec Isa et Céline, autre faluchée. Puis d'autres danses. Et la soirée s'acheva. On me ramena chez moi. Demain j'avais cours à 10 heures.

Novembre (25). J'ai forcement la gueule de bois, vu ce que je faisais il y a encore quelques heures. Je suis le seul de ceux qui ont fait la fête hier soir, à être allé en cours. Je m'ennuie dans l'amphi. Malgré mon genou de verre, je suis le seul qui ai la forme. Sans Stef. Seul. Je pense à la soirée d'hier. Je souris. Je me rappelle des filles dont j'ai fait connaissance. Céline... Où cela en était ?
J'ai cru ne revoir personne de la soirée d'hier jusqu'à ce que je voie Stef attendant son bus. Elle me dit que son parrain s'était planté en rentrant chez lui après la fête. Sans gravité. Journée frustrante à guetter Céline. Il y a des attitudes qui ne trompent pas.
Déjà vendredi. Cette semaine fut supersonique. Les semaines commencent sérieusement à être machinales.

Novembre (30). Encore une réunion pour le journal, où naissent quelques tensions. Comme pour les assemblées générales. Cela détériore l'atmosphère. C'est dommage. J'ai l'impression que tout le monde taille quelqu'un par derrière. Il y aura certes toujours quelques fêtes où je ferais des découvertes sur les antécédents des membres de l'association, où je ferais des choses auxquelles je ne m'attendais pas, comme aller aux croissants après une fête, comme les samedis dans mon village. Sympathique. Novembre se termine dans le calme.

Décembre (2). Avant-dernière semaine avant les partiels. Le temps passe de plus en plus vite, avec les réunions et les fêtes de fin d'années en ligne de mire.
Je fais un point sur mes conditions de vies dans mon immeuble. Il y a une froideur entre voisin qui est lamentable. Sur les quatre portes de mon couloir, je ne connais que deux locataires, et encore…
Avant d'attaquer les partiels, j'avais prévu d'aller boire un verre avec Stef dans une rhumerie, retrouvant là-bas, d'autres de ma section. Affrontant la nuit et le froid. Comme j'étais passé directement chez Stef sans repasser chez moi, j'avais toujours mon petit cartable. Après quelques verres, une démonstration de zouk de Stef, une de moi au billard, de la rhumerie nous sommes allés à une soirée organisée par les étudiants en pharmacie, dans la même salle où a lieu les soirées médecines.
Arrivé à la salle, disons que ça allait. J'avais emmené des amuses gueules. Je tombe sur mon parrain de ma confrérie. Il me force à participer à un jeu de verre musical autour d'une table. Ce n'est pas fini. Nous achevons la soirée, et moi par la même occasion, en nous rendant à une soirée Economie. Je ne sais pas quand nous sommes arrivés et partis, je ne sais pas si j'ai fait autre chose que de danser sur de la pop, je sais seulement que j'ai été bien malade en rentrant dans mon studio. C'était le black out. Je dansais beaucoup, je crois, il y avait de la bonne musique, Canonball.

Décembre (3). Vu la soirée d'hier soir, cette nuit, les quatre heures de droit ce matin ne sont pas passées comme une lettre à la poste. J'ai du dormir deux heures, de 5 à 7. Heureusement Stef est solidaire de mon état. L'habituel coca de la pause de 10 heures me décape. A cette pause, je surpris une conversation où j'appris que des groupes intéressant passer dans la banlieue pour un concert. La fille qui parlait était physiquement entre Tori Amos et Brenda Khan. Son frère était anarchiste et moi je devenais presque amoureux d'elle. Alors, je serais anarchiste !
A midi, une lettre de mon médecin du sport pour m'annoncer que je dois passer des radios. Cours l'après-midi, et puis, je rentre au bled, voir la bande. Je passe voir Nadège. Son ventre grossis. Tout le monde rentre de droite et de gauche. Oliver se prépare pour son service. Dernier week-end avant la dernière semaine de cours.

Décembre (6). Je passe le plus clair de mon temps libre entre midi et deux heures, au local de ma section. Sinon, mon genou me faisant toujours souffrir, enflé, je dois consulter un médecin spécialiste du sport, mais j'ai la sensation que cela ne sert pas à grand chose. Je dois plutôt passer des arthrographies le 17. Je commence à en avoir marre des banalités : réunions, assemblées.

Décembre (9). Je décide d'abréger ma semaine. Je fuis la ville, malgré la grève des trains, et j'arrive très tard chez moi. En attendant un train, je suis allé au cinéma avec Stef et Val. Je remets mes révisions à plus tard, bien trop énervé et fatigué.

Décembre (13). Premier partiels. Durs. Toute la semaine sera comme ça, finissant par une bonne série d'arthrographies. Je vois Stef et je lui dis que ce vendredi, je me fais tirer le portait du genou.

Décembre (15). Cette semaine est bizarre. Je ne vois personne. Tout le monde est plongé dans les pages de cours. Personne ne sort.

Décembre (17). Dernier jour, dernière épreuve. Je vois Stef à 10 heures, et nous allons boire un coup au distributeur. Juste avant les vacances je procède donc à cette fameuse séance d'arthrographie, pour connaître vraiment l'état de mon genou. Je traverse toute la ville. Un nombre infini de radio après avoir été mis K.O. par l'injection du liquide permettant de prendre ces arthrographies. A la vision de la taille de la seringue j'étais déjà blanc. En sortant de la clinique, je tombe sur une autre Stéf, qui est avec moi en cours. Elle me demande si ça c'est bien passé, bonnes vacances… je suis fatigué. J'avais un rencard ce soir avec la fan des Beatles. Je reporte cela à demain. Je fais un point sur mon premier semestre. Angoissant. A part Stef en journée et les autres du lycée, je ne vois quasiment personne. Je pensais rencontrer plus de personnes, notamment britanniques.

Décembre (18). Je commence ces vacances en rendant visite à la fan des Beatles. Nadège attends un heureux événement. Je pense à ces partiels de décembre souvent décisifs quant à la suite de l'année universitaire et des études supérieures. J'ai aussi à la rentrée, la lourdeur de devoir faire mes trois jours pour le service national. Je navigue à vue dans les deux cas, ne voyant pas mon avenir avec certitude.
Au Mamba, il y avait une photo de Björk au bar, pour un concours photo. Il faut prendre une personne dans la même position qu'elle. Tout de suite j'ai pensais à une fille du lycée que j'aimais bien. Mais je ne me sens pas d'attaque pour la prendre en photo.

Décembre (20). Je fais un tour autour du lycée. Je vois Ivan dans la cours du lycée, un copain qui est toujours ici. Et voilà que je tombe sur elle, N. Habillée court et moulant. Elle dit qu'elle est heureuse de me revoir, que j'ai une belle coupe de cheveux. Elle me présente à un élève, lui dit que je suis un grand maintenant, que je suis à la fac. Alors, je lui dis que la fac, c'est pas super. Pour l'embêter, et parce que c'est vrai. Arrive Joanna ! Toujours radieuse. Je l'ai toujours plus aimé que N. J'aimerai l'embrasser. N nous invite le soir à boire un verre dans un bar américain de la ville. Mais elle nous pose finalement un lapin. Toujours aussi menteuse. Dire que l'après-midi, j'étais presque à l'effleurer de la main ! Pour la tester. Je reviendrais la voir demain, pour qu'elle s'explique.

Décembre (21). C'est le jour de l'hiver. Ivan m'a invité à manger à midi. Puis on va boire un coup au café situé à côté du lycée, histoire d'être cool avant de voir N. Je me débrouille pour la voir en début d'après-midi.
Elle m'invite à faire un tour de voiture. Elle doit régler des problèmes administratifs dans un autre lycée. Sur la route elle prend subitement ma main dans sa main. Surpris, je me laisse reconquérir. Les problèmes enfin réglés, nous allons dans un café, elle là, elle m'embrasse. Elle m'invite à prendre un thé chez elle. Toujours les mêmes goûts de livres, de musique, de décoration. On s'embrasse de plus belle, j'embrasse la plus belle. Toujours le même goût de lèvres... Elle me promet, maladivement des vacances de Noël ensemble, des bains dans le jacuzzi… Je retombe sous l'influence de N, après tout le mal qu'elle m'a fait.
C'est bientôt Noël. Nadège va bientôt accoucher de Dylan. Elle va passer le réveillon de Noël loin de son concubin, vu qu'il travaille. Mais on s'est mis d'accord pour faire une petite fête chez elle, avec quelques autres.

Décembre (24). La plus belle nuit de l'année. La neige s'est installé sur les paysages et sur les routes depuis quelques jours. Avec ponctualité, contrastant avec les années précédentes. Elle était déjà tombée une fois cette année, à la fac.
Pour une fois je réveillonne Noël entre amis et non en famille. Chez Nadège. Est-ce bien sérieux vu son état ? Je rejoins son domicile avec Oliver, empruntant l'artère principale enneigée. Nous avons fait connaissance avec un de ses cousins, moins timbré que le précédent qu'elle nous avait fait découvrir, il y a quelques temps.

Décembre (31). Les jours ont passé. N ne m'a pas donné de nouvelles. Pas de nouvelles, avec elle ce n'est pas signe de bonnes nouvelles. Je m'étais fait à l'idée de passer le réveillon avec elle.
Nadège a accouché avant-hier. Nous sommes tous allés la voir à la maternité. Réveillon en bande en comité restreint. Certains sont allés au restaurant sans prévenir. Aucune organisation. Qu'il est loin le 31 décembre de l'an dernier ! Nous arrivons quand même à nous éclater. Je suis un peu malade en boite, mais suivant les conseils de notre chef, je rebois par dessus et je retrouve la pêche jusqu'à ce que je sorte prendre l'air dehors accompagné d'Oliver et du cousin. Il neigeait à ce moment là, c'était beau.
J'ai revu souvent Stefany, Steffy, la fille du 14 juillet. Elle va mieux dans sa tête, parce qu'au début de notre rencontre, elle avait plein d'idées noires dans la tête. Je la vois souvent les samedis soir, on voit boire dans le café à côté de la boite. Des fois, je vais la chercher à Roanne. Elle me veut, moi non plus... du tout. Nous sommes bons amis. Je la surnomme "Steffy", parce que "Stef" est déjà pris.

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